Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 42.djvu/919

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Coubre n’a pas perdu moins de 600 mètres, et son ancien rivage est remplacé par des bas-fonds. On dit que pendant l’hiver de 1862 la mer a détruit la plage sur une largeur de 150 mètres au pied des dunes abruptes de la Pointe-Espagnole.

La côte inhospitalière d’Arvert est à bon droit redoutée des marins; mais c’est à son extrémité septentrionale, près de la Pointe-Espagnole, que les navires sont exposés aux plus grands dangers. Là s’ouvre le célèbre pertuis de Maumusson, qui fait communiquer la haute mer avec l’embouchure de la Seudre et les Couraux d’Oléron. D’après la tradition, il était jadis beaucoup plus étroit que de nos jours. En 1335, pendant le cours d’une discussion soulevée entre le seigneur de Pons et Philippe de Valois au sujet de délimitations territoriales, cent témoins, qui peut-être avaient été achetés, affirmèrent unanimement que dans leur enfance l’île d’Oléron était séparée du continent par un simple fossé qu’on pouvait franchir d’un saut en s’appuyant sur un bâton; mais ces dépositions ne peuvent avoir qu’une faible valeur contre les textes positifs des auteurs anciens et le témoignage de nombreuses chartes du moyen âge. Il est donc très probable que le pertuis existe depuis des milliers d’années et constitue un véritable détroit, sans cesse élargi par les courans. Au commencement du XVIIIe siècle, il donnait accès à des bâtimens de 40 tonneaux. En 1813, sa largeur était presque doublée, et le Regulus, vaisseau de quatre-vingts canons, se glissait par cette dangereuse passe afin d’éviter la croisière anglaise. De nos jours, le pertuis de Maumusson offre un peu plus de 2 kilomètres de la pointe d’Arvert à la pointe dite de Maumusson, et sa profondeur moyenne sur la barre est de 2 à 3 mètres à l’heure des basses marées.

Ce terrible pertuis, dont le nom est synonyme de mauvaise entrée, et que les marins de la Seudre redoutent comme une sauvage divinité des mers, doit ses dangers au choc des courans de marée qui viennent s’y rencontrer, l’un venant de la haute mer, l’autre sortant des Couraux d’Oléron après avoir fait le tour de l’île entière. Avant l’heure de la marée, un courant qui se porte du nord au sud passe à travers le pertuis comme un fleuve animé d’une vitesse d’un mètre et demi par seconde; mais, quand le flot commence à venir du large, le courant refoulé bat peu à peu en retraite vers le nord, et se développe en larges ondes autour des pointes et dans la profondeur des anses. Deux bancs de sable, le Grand-Gâtesau et le Petit-Gâtesau, déposés obliquement par la marée de chaque côté du chenal, forment la barre du pertuis avec les mattes ou bancs d’Arvert situés sur la côte du continent, et soutiennent de chaque côté la pression des flots. Souvent le mélange des eaux s’opère d’une manière assez paisible, et ceux qui viennent alors visiter le pertuis dans