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jours incliner vers un système d’action commune avec la France. M. Pastor Diaz était un des dissidens de la fraction de M. Bios Rosas. Là était justement la difficulté. Si le général O’Donnell n’avait pris que les hommes pour en faire des ministres sans adopter aucune de leurs idées, il n’avait nullement dénoué la crise, et il restait à savoir si ses nouveaux collègues se prêteraient à ce jeu; s’il était animé d’un désir sérieux, sincère de conciliation, s’il subissait la nécessité d’une politique nouvelle, il abaissait sa fierté devant des adversaires de la veille, et il risquait de froisser la majorité qui l’avait soutenu jusque-là. Cette situation équivoque éclatait dès le premier jour, lorsque le nouveau cabinet se présentait devant les chambres. D’un côté, le général O’Donnell, tout en parlant de conciliation, déclarait que rien n’était changé, que la politique était toujours la même, qu’il n’y avait que quelques hommes de plus; d’un autre côté, M. Pastor Diaz, qu’on pressait d’interpellations, à qui on rappelait un non retentissant qu’il avait prononcé au sujet de la politique du précédent cabinet, répondait d’une façon significative, quoique modérée : « J’avais dit non à la politique du gouvernement dans certaines questions. Ce non est dit, je ne le renie pas, et non-seulement je ne le renie pas, mais sans ce non ma présence sur ce banc n’aurait pas de raison d’être; sans ce non et d’autres non, il n’y aurait pas eu les doutes et les perplexités qui ont produit la crise. Une modification du cabinet n’eût pas été possible, et elle eût été même absurde... » Et en présence de ces déclarations à demi voilées M. Rios Rosas lui-même ajoutait : « Le gouvernement a aujourd’hui toute ma bienveillance, et j’ajoute qu’il est possible, qu’il est probable que demain il aura tout mon appui. « 

Au fond, on était dans la confusion, et tout était à faire encore, tout était à éclaircir. M. Rios Rosas attendait avec des dispositions favorables; d’autres députés à leur tour, au nom de l’ancienne majorité, se retranchaient de même dans l’expectative, mais en laissant entrevoir leur hostilité, si la politique changeait. C’était une crise qui n’avait fait que changer de forme. Il est certain toutefois qu’il y a eu un moment où des négociations sérieuses ont été engagées avec M. Rios Rosas pour arriver à une complète intelligence ; mais, au moment même où ces négociations étaient engagées, le ministre de l’intérieur, le marquis de la Vega de Armijo, déclarait à l’improviste et avec une sorte d’affectation dans le congrès que le gouvernement adoptait l’opinion déjà formulée par la majorité du congrès sur la loi municipale : c’était justement un des points de dissidence. Dès lors tout a été rompu, M. Pastor Diaz a donné sa démission, et les hostilités allaient sans doute recommencer plus ardentes, lorsque le ministre d’état, le général Serrano, se rendait au sein du congrès avec un décret de suspension en attendant la dissolution. Maintenant quel est le caractère de ce cabinet ainsi démembré, reconstitué et remanié encore? Ce n’est plus ni l’ancien ministère, ni le nouveau. Un seul fait apparent, c’est la prédominance du général O’Donnell absorbant en lui le pouvoir, éclipsant ses collègues, posé