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consistait, après la mouture du grain, en un lavage de tous les gruaux bis qui permettait de faire entrer ces produits inférieurs dans la pâte à pain blanc, pourvu qu’on eût le soin de ne les mélanger qu’après toute fermentation vers la fin du pétrissage, c’est-à-dire au moment de procéder à la dernière frase[1]. Le lavage et le tamisage des gruaux bis présentaient dans la pratique des difficultés sérieuses et des inconvéniens de plus d’un genre ; on est parvenu à les supprimer à l’aide d’une simple épuration mécanique des gruaux gris par le nouveau sasseur aspirateur de M. Périgaud, meunier à Rennes. Cet ingénieux appareil enlève, par une ventilation qu’on règle à volonté, les légères membranes dites embryonnaires, placées dans le grain à la périphérie du périsperme. Ces membranes recèlent un principe naturel actif, saccharifiant, analogue à la diastase, mais qui a la fâcheuse propriété de déterminer pendant la fermentation cette coloration brune et le goût désagréable qui caractérisent le pain bis. Après l’élimination de ces pellicules, recueillies d’ailleurs sur des étagères pour être employées dans la nourriture des animaux avec les résidus des remoulages, les gruaux bis peuvent être, sans autre préparation, ajoutés à la pâte vers la fin du pétrissage. En somme, de 100 de blé bien nettoyé, on obtient par la mouture 50 de farine dite de fleur et 20 des premiers gruaux remoulus, puis 7 de gruaux blancs et 5 de gruaux gris, la totalité formant ainsi 82 de produits panifiables. On recueille en outre 16 de son, gros et petit ; la perte sur le poids primitif se réduit donc à 2 centièmes.

Des 82 parties de farines et gruaux résultant de cette mouture simplifiée, on obtient de 110 à 112 de pain blanc, tandis qu’en suivant les procédés usuels, 100 de blé produisent seulement 70 de farine, pouvant donner 94 de pain blanc. Une aussi notable augmentation, — 12 de farine, ou de 16 à 18 de pain blanc, pour chaque quintal de froment employé, — a décidé l’administration parisienne à mettre en pratique le nouveau système pour la totalité de la fabrication, qui dépasse journellement 20,000 kilos de pain dans la boulangerie des hospices. Une partie des produits ainsi obtenus est vendue au public sur les marchés de Paris, concurremment avec le pain blanc de la boulangerie ordinaire.

La seconde invention récente offre cela de remarquable qu’elle supprime toute fermentation[2], par conséquent l’emploi des levains

  1. Expression technique employée dans les boulangeries pour indiquer les opérations successives du pétrissage.
  2. Autrefois on supposait qu’une réaction spéciale était nécessaire pour faire lever la pâte ; on la nommait fermentation panaire : ce n’était en réalité dans les conditions les plus favorables qu’une fermentation alcoolique.