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Ce n’est pas, on le voit, sans raison que je signalais aux économistes la crise qui sévit en Angleterre comme un spectacle instructif. L’industrie dans sa forme nouvelle est attaquée à peu près par tout le monde, et si l’on admire les résultats obtenus, on semble déplorer en même temps les souffrances qu’ils entraînent, et les sacrifices qu’ils imposent. Sur cent personnes en France qu’on interrogera sur l’état des ouvriers en Angleterre, quatre-vingt-dix-neuf répondront que toutes ces richesses enfantées par l’industrie anglaise l’ont été aux dépens de ceux qui concourent à les créer. C’est là une opinion arrêtée, semblable à ces erreurs d’observation qui ont cours même dans les sciences expérimentales, jusqu’à ce qu’un nouvel examen mette en lumière les faits dans toute leur réalité. Quand il sera reconnu que, bien loin de répandre la misère et la dégradation parmi les classes ouvrières, l’industrie dans sa forme nouvelle augmente l’aisance et élève le niveau moral de ceux qu’elle emploie, quelle valeur auront les déclamations d’aujourd’hui contre l’exploitation par le capital ? Quel prétexte auront les demandes d’intervention de l’état, l’organisation du travail, d’association ou de coalition des travailleurs contre le capital et contre ceux, qui les emploient ? S’il est démontré que dans les contrées où l’industrie a atteint son plus grand développement on voit aussi le taux des salaires le plus élevé, la vie à meilleur marché que partout ailleurs, le temps de travail le moins long, le caractère le plus digne, n’aura-t-on pas enfin la preuve que dans le régime de l’industrie pratiqué en Angleterre se rencontrent les meilleures conditions pour les travailleurs ? Aucun système ne peut prétendre à posséder, la solution immédiate des problèmes qui préoccupent à juste titre les esprits ; mais, d’après les résultats obtenus jusqu’ici, on peut soutenir que dans le libre développement des conditions nouvelles du travail et des transactions s’offre la voie qui conduit le plus sûrement au bien-être et à l’élévation morale des classes laborieuses.


F. VERDEIL.