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se porter sur d’autres gisemens, les placers des montagnes, où le génie du mineur devait bientôt obtenir d’étonnans résultats.

Les placers des montagnes sont ces dépôts de matières arénacées mêlées d’or métallique, débris des roches aurifères primitives que l’action des eaux, pendant la première période de l’époque diluvienne, étendit en couches puissantes sur tout le versant occidental de la Sierra-Nevada. Ces couches furent dévastées par les révolutions géologiques des âges suivans. Elles restent cependant encore sur de fort grandes surfaces. Elles s’étendent en effet, presque sans solution de continuité, sur 150 kilomètres du sud au nord et 40 kilomètres environ à travers les comtés de Sierra, de Placer et de Nevada. Elles forment des plateaux élevés, des terrasses s’étageant graduellement sur les çontre-forts de la Nevada, et partout elles viennent couronner les vallées d’érosion que les eaux ont creusées à 150 et 200 mètres au-dessous d’elles dans le roc vif de la montagne. Ces couches sont fort épaisses ; l’ensemble mesure rarement moins de 12 mètres de puissance, et en certains lieux j’ai pu m’assurer qu’elles atteignent à plus de 00 mètres de hauteur. Elles sont aurifères dans leur masse entière, plus riches cependant dans les gros galets entassés à leur base que dans les sables fins qui les terminent près de la surface du sol. Chaque couche a donc une richesse variable suivant le niveau qu’elle occupe, tandis qu’au contraire l’expérience a prouvé que la série entière des couches, prise de la base au sommet, avait une richesse moyenne sensiblement constante sur toute l’étendue de la formation.

Tout ce terrain, qui couvrirait bien probablement une surface de 15,000 kilomètres carrés d’une couche de minerai d’or ayant au moins 10 mètres de puissance[1], doit être considéré comme un gisement aurifère de richesse sensiblement constante, pour l’exploitation duquel on peut organiser des entreprises solides, comme on le ferait pour des couches de houille ou de minerai de fer. La richesse générale moyenne de toute la formation, si on l’évalue d’après le mètre cube d’alluvion, est fort médiocre. En la fixant à 1 fr. 50 cent., je serais encore au-dessus du chiffre donné par un grand nombre d’exploitations[2]. Combien on est loin de ces temps où les sables de certaines rivières rendaient 9 pour 100 de leur poids d’or ! C’est cependant avec des minerais d’aussi pauvre espèce, valant au plus un franc la tonne, que le mineur est arrivé à produire 220 grammes d’or, près de 750 francs, par homme et par jour de travail. Reste à voir comment il a pu faire.

  1. Ces chiffras ne sont pas le résultat d’observations spéciales précises ; ils ne traduisent qu’une impression générale, et je crois rester, en les donnant, bien au-dessous encore de la réalité.
  2. Je veux ici parler de la teneur de rendement ; la teneur absolue est inconnue.