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CARION.

Par des grêlons plus gros que des citrouilles !

CHRÉMYLE.

Mes meules entraînées par les eaux gonflées de l’Ilyssus !…

CARION.

Et servant de refuge à nos pauvres poules effarouchées !

MYRTO.

La peur n’a-t-elle pas troublé vos esprits, mon père ? J’ai entendu un grand bruit ; mais voyez : il n’est tombé ici ni grêle, ni pluie, ni foudre.

CHRÉMYLE.

Ah ! que n’y suis-je resté sous la protection d’Apollon ! que n’en ai-je chassé Plutus, au lieu d’offenser Jupiter ! Cette méchante nuée eût été crever plus loin, chez les autres. Hélas ! je n’ai que ce que je mérite, et mon impiété est punie.

MYRTO.

Et Plutus, ne le ramenez-vous pas ?

CHRÉMYLE, soupirant.

Plutus ? Hélas !

CARION.

Plutus a disparu, voilà le pire ! Un éclat de la foudre ayant de nouveau brûlé ses yeux, le perfide Mercure a profité du désordre et de la terreur où nous étions pour l’enlever en se moquant de nous.

CHRÉMYLE.

Ah ! c’est un grand malheur ; mais tout n’est pas perdu, puisqu’il me laisse beaucoup d’or et d’argent…


SCÈNE VI.
LES MEMES, LA PAUVRETÉ.


LA PAUVRETÉ.

Tout cela est perdu, Chrémyle. Pendant que vous couriez tous au temple, ta femme, effrayée de l’orage et craignant le courroux des dieux, s’est hâtée de jeter tous tes trésors dans le fleuve. Les flots emportent maintenant à la mer tes richesses d’un jour.

CHRÉMYLE.

O imbécile de femme !

MYRTO.

Mon père, elle a bien agi ; elle a désarmé Jupiter et préservé votre tête de la foudre.

BACTIS.

Chrémyle, il te faut prendre courage ; nous recommencerons tous à travailler.

CHRÉMYLE.

Il le faut bien ; allons, enfans, à l’ouvrage ! Tâchons de courir après nos gerbes et de sauver ce qui nous reste.