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nir lui-même doit être assisté par sa paroisse. A cet effet, plusieurs paroisses se réunissent pour former une union et supporter en commun la charge de l’assistance; des officiers sont élus, qu’on appelle les gardiens de la loi des pauvres. Ceux-ci sont chargés de faire le budget de l’entretien des pauvres de l’union, de fixer la taxe nécessaire pour cela et d’administrer les fonds qu’elle produit. Ils sont sous le contrôle d’employés du gouvernement appelés commissaires de la loi des pauvres, lesquels relèvent d’un ministère spécial, aujourd’hui dirigé par M. Villiers, bien connu par le rôle important qu’il joua dans l’abolition des corn laws.

La taxe des pauvres est imposée sur le revenu normal de la propriété foncière; on l’estime à tant de pence et de shillings par livres de ce revenu. Ainsi le revenu de toutes les propriétés de l’union de Manchester (qui ne comprend qu’une partie de cette grande ville) étant estimé à 800,000 liv. sterl. ou 20 millions de francs, chaque shilling ajouté à la taxe place 40,000 liv. sterl. ou 1 million de francs entre les mains du bureau des gardiens. La taxe est levée par les officiers de police, qui, on le sait, ne dépendent en général qu’indirectement du gouvernement central. Les contribuables, s’ils se trouvent individuellement surtaxés, en appellent au commissaire. Enfin les comptes-rendus de toutes les opérations des gardiens sont soumis au parlement, mais seulement pour son information, et pour recevoir non sa sanction, mais son contrôle.

Rien ne limite d’ordinaire le taux de cette taxe. Il faut avant tout que les pauvres vivent et que les gardiens réunissent la somme nécessaire pour cela. C’est ainsi qu’on vit en Irlande, dans le temps de la famine, la taxe s’élever jusqu’à 20 et 21 shillings par livre, c’est-à-dire atteindre et même dépasser la valeur totale du revenu imposé. Le principe de cette taxe est sans doute bien dur pour les districts frappés par une crise extraordinaire. Chaque fois que le nombre des pauvres s’accroît rapidement et qu’il faut par conséquent élever la taxe, cet accroissement est la conséquence d’une crise dont le premier effet a dû être de ruiner les contribuables et de diminuer la valeur réelle de la matière imposable. On comprend combien est lourde cette taxe de 2 shillings payée par l’union de Manchester, qui a paru si légère à ceux qui ne se rendaient pas compte de la situation, et qui a excité de si vives critiques en Angleterre. Aussi, comme on sait, une loi a-t-elle autorisé les unions surtaxées à partager avec leurs voisines l’excédant de leur taxe des pauvres au-dessus d’un certain taux; mais cette mesure indispensable ne fait en réalité qu’alléger les charges là où les unions étaient incapables de les supporter, le principe reste le même : c’est celui de l’indépendance communale, essence et fondement de la constitution anglaise, et les bienfaits que ce principe leur assure sont