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empire d’Occident. Théodose II, pour empêcher l’esprit de révolte de passer des états de son oncle, dans les siens, venait de fermer ses frontières par une ligne de soldats, de telle sorte, que les Italiens ne pouvaient plus pénétrer sur les terres de l’empire oriental sans une autorisation du gouvernement de Ravenne, ou la signature d’Honorius.

Attale, à son arrivée, se vit en face de la même question qui agitait quelques mois auparavant avec tant de vivacité le sénat et Rome tout entière : elle se reproduisait avec l’aggravation, que lui donnaient les circonstances nouvelles. Il n’y avait en effet qu’un seul moyen d’empêcher la famine : c’était de conquérir l’Afrique ; il n’y en avait qu’un non plus de calmer cette populace en délire : c’était de préparer une expédition ou de faire voir au moins qu’on y songeait. La question fut mise d’urgence en délibération dans le sénat. Alaric consulté renouvelait son ancienne proposition d’envoyer à Carthage Druma avec une petite armée prise dans l’élite des guerriers goths ; le sénat, en plus grande majorité que la première fois, se rangeait à cet avis ; mais Attale le combattit encore, et avec d’autant plus de violence qu’il était presque seul. Une seconde opinion se fit jour, celle d’une expédition mixte où les troupes barbares et les troupes romaines se trouveraient en nombre égal : Attale la rejeta, comme l’autre. Tout entier à ses idées d’intervention pacifique et toujours convaincu, malgré l’événement, qu’il fallait se borner aux moyens de douceur mêlés d’un peu de corruption, il engagea le préfet du prétoire à se charger de ce rôle, mettant à sa disposition quelques navires et beaucoup d’argent. Non-seulement celui-ci déclina l’offre, mais en plein sénat, il motiva son refus dans des termes durs, jusqu’à l’insolence : « C’était là, disait-il, une offre dénuée de sens. Là où Constantin s’était fait tuer avec les siens, il n’irait pas se faire tuer aussi de gaîté de cœur et semer dans les mains d’Héraclianus l’argent de l’Italie. » Attale, à ces paroles, se leva tout bouillant de colère, et rompit la délibération avant le vote de l’assemblée. On ne sait trop ce qu’il fit lui-même ; il paraît cependant, d’après quelques mots des historiens, qu’il rencontra un homme assez complaisant ou assez fou pour tenter l’aventure, laquelle ne réussit pas mieux cette seconde fois, que la première.

Évidemment Attale ne montrait pas le fond de sa pensée, mais on y pouvait lire, et tout le monde y lut. Ce qui l’animait, c’était la défiance d’Alaric et des Goths portée jusqu’à la haine, et aussi le désir de se poser à la face du monde en homme indépendant et en maître. Le sénat, inquiet pour sa propre responsabilité, jeta feu et flamme ; le parti païen se crut trahi, et, en effet son triomphe tenait à l’existence du nouveau gouvernement, et l’existence du nouveau