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de 16 kilomètres. Le nombre des habitans s’élève, au dire des indigènes, à un million. Le Jodo-kava, qui la traverse en se divisant en plusieurs bras, n’est navigable que pour des bâtimens d’un faible tonnage. Une ville voisine, Hiogo, sert de port maritime à Osakka : c’est là que les jonques débarquent leurs marchandises, qui sont transportées à leur destination par voie de terre ou sur de petits chalands. Les rues d’Osakka sont larges, tirées au cordeau et coupées à angle droit; les habitations des marchands y dépassent en dimensions, en luxe, en commodités, celles des autres bourgeois japonais; ceux-là ont su s’affranchir jusqu’à un certain point de la tyrannie des règlemens somptuaires, dont l’observance est partout rigoureusement exigée. Osakka possède un magnifique château, résidence des anciens chiogouns[1], un vaste théâtre, beaucoup de temples, et, comme Yédo, une quantité innombrable de maisons de thé et de lieux de plaisir.

Non-seulement Osakka est la principale ville de commerce du Japon, mais on peut même la compter parmi les grandes cités marchandes du monde. Elle a des relations fort étendues, et on assure que la plupart des marchands japonais établis à Yokohama ne sont que les agens des maisons d’Osakka. Les artisans et artistes partagent avec ceux de Kioto le renom d’être les meilleurs et les plus habiles du pays : ils fabriquent des meubles et ustensiles en bois verni, ils sculptent l’ivoire, le bois, la pierre; ils coulent le bronze et travaillent avec beaucoup d’imagination et d’adresse l’or, l’argent et les autres métaux précieux. Ils excellent surtout à fabriquer les armes blanches et à tisser les plus riches étoffes de soie[2]. A Osakka est l’entrepôt des thés japonais, à Kioto celui des soies grèges. Toutefois il est probable qu’après l’établissement des étrangers on y fera d’importantes affaires en soie.

Hiogo, le port d’Osakka, devait également être ouvert le 1er janvier 1863; il ne le sera qu’après la franchise d’Osakka. C’est déjà une ville florissante, qui compte environ 150,000 habitans; le port peut abriter les plus grands navires, et au point de vue de nos relations commerciales il sera probablement un jour à Osakka, mais sur une plus vaste échelle, ce que Yokohama est aujourd’hui à Yédo, à savoir l’entrepôt des marchandises expédiées d’Europe et d’Amérique.

  1. Hiéas, le fondateur de la dynastie des taïkoums ou chiogouns actuels, vint s'établir à Yédo. Plusieurs de ses prédécesseurs avaient résida à Osakka, notamment le fils de Taiko-sama, Fidé-Jori, victime de l'ambition d'Hiéas, son tuteur, qui l'assassina.
  2. Les plus belles porcelaines japonaises sont fabriquées dans les provinces de Fisen et d'Oudri. Celles de Fison apparaissent sur le marché de Nagasacki; celles d'Oudri sont transportées à Yédo et à Osakka.