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plus sage ; les cadres actuels suffisent aux ingénieurs civils, et, s’il y avait affluence, on pourrait élargir ces cadres sans recourir à de nouvelles créations. Voyons si le cas est le même pour les contremaîtres et les ouvriers. Trois écoles des arts et métiers en reçoivent un certain nombre, trois cents par école, neuf cents en tout. L’instruction y est essentiellement pratique ; cinq heures trois quarts par jour sont consacrées à la théorie, sept heures à l’apprentissage manuel. La durée des études est de trois ans ; le travail ne porte que sur le fer et le bois, dans quatre ateliers distincts, celui du tour et des modèles, celui de la fonderie, celui de la forge, celui de l’ajustage ; l’enseignement du dessin est triennal. Chaque année, ces trois écoles versent dans les ateliers des machines trois cents jeunes gens dont la main et le jugement sont formés ; les uns entrent, comme mécaniciens, au service de la flotte, des compagnies de navigation ou de chemins de fer, c’est l’élite ; d’autres exploitent pour leur compte de petits établissemens de serrurerie ou de menuiserie, d’autres deviennent contre-maîtres dans les fabriques, d’autres enfin, et c’est le plus grand nombre, se placent comme dessinateurs et acquièrent une grande habileté dans la composition des pièces. Quant aux écoles des mines, elles se renferment exclusivement dans leur objet ; Saint-Étienne prépare des gardes-mines et des directeurs d’exploitations métallurgiques, Mais des maîtres mineurs. Pour ces derniers, un régime à part est en vigueur : les élèves restent ouvriers dans les mines et doivent suffire par leur salaire à leur nourriture et à leur entretien ; les frais à la charge de l’état sont ainsi réduits au strict nécessaire, et l’école ne prend que les heures dont le chantier ne dispose pas. Tous ces établissemens remplissent pleinement leur objet ; l’enseignement y est ce qu’il doit être, élémentaire, mais approprié, professionnel dans toute la rigueur du mot. Les ouvriers, quand ils en sortent, sont assurés de trouver de l’emploi à des conditions avantageuses. Leur certificat d’étude est un titre qui a cours dans le domaine de la main-d’œuvre, et dont la valeur est désormais vérifiée : il constate à quoi ils sont propres et quel fond on peut faire sur leur travail.

De toutes les épreuves, aucune n’a été ni plus concluante ni plus heureuse ; c’est bien là un exercice manuel, un apprentissage sérieux. Il semblerait naturel d’en conclure que, puisque le type est reconnu bon, il n’y a plus qu’à le reproduire. On retendrait d’abord aux matières déjà essayées, le fer et le bois, puis à d’autres arts qui ne sont pas moins essentiels, l’art du bâtiment, l’art du tissage, de l’impression et de la teinture ; on pourrait le pousser jusqu’à des arts plus délicats, les arts de précision et d’ornement, le traitement des métaux ; enfin on irait dans une certaine mesure jusqu’aux arts