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face de la France; il fallait en mesurer un autre près de l’équateur, puis un autre dans les régions polaires. Par ces opérations comparées entre elles, on espérait déterminer la vraie figure du méridien terrestre, que l’on supposait pour le moment être une ellipse. Le but qu’il s’agissait d’atteindre était double : il fallait connaître le grand axe de cette ellipse, c’est-à-dire le diamètre terrestre dans le plan de l’équateur, et en outre le petit axe, qui est le diamètre d’un pôle à l’autre.

Cette question de la mesure de la terre fut au siècle dernier l’une des grandes préoccupations des savane, et surtout des savans français. Il n’est que juste de rappeler que la géodésie est une science éminemment française, et que les astronomes de notre pays furent à peu près seuls pendant longtemps à s’en occuper. Maintenant encore les étrangers ne font qu’appliquer sans modifications importantes les procédés inventés par nos compatriotes. En 1736, l’Académie des sciences reprit avec persévérance l’examen de la question ; plusieurs de ses membres furent chargés d’expéditions lointaines, Maupertuis en Laponie, Bouguer et La Condamine au Pérou, tandis que Cassini prolongeait la triangulation de Picard d’une extrémité à l’autre de la France. Vers la même époque, l’abbé Lacaille mesurait un degré au cap de Bonne-Espérance, et des opérations analogues étaient faites en Amérique, dans l’état de Pensylvanie, et en Italie. Par malheur les résultats de ces travaux s’accordaient mal. Maupertuis, contrarié par la rigueur du climat, n’avait pas prolongé ses triangles assez loin. L’arc mesuré par Lacaille était aussi trop court. Bref, l’incertitude était telle sur la valeur véritable du méridien terrestre qu’en 1792, lorsque la convention nationale voulut créer le nouveau système de mesures décimales, dont le mètre (dix millionième partie du quart du méridien terrestre) devait être la base, il fut indispensable de recommencer avec plus de soin les opérations antérieures qui se contredisaient. L’arc mesuré au Pérou par Bouguer et La Condamine étant admis comme bon, on résolut de reprendre la mesure de l’arc français entre Dunkerque et Barcelone. Delambre et Méchain furent chargés de ce travail. C’est d’après leurs calculs que fut fixée la longueur légale du mètre. Il faut remarquer à ce sujet que la convention s’était assigné un but quelque peu illusoire lorsqu’elle se proposait d’adopter une unité de mesure prise dans la nature qui ne fût ni spéciale à une contrée, ni variable avec le temps. D’abord la détermination rigoureuse de cette unité présentait de si grandes difficultés qu’il est presque certain qu’on obtiendrait aujourd’hui un résultat un peu différent avec des instrumens et des méthodes perfectionnés. Il faut encore tenir compte des erreurs de calcul qui se glissent involontairement dans un tra-