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moyens de concilier l’unité italienne avec les besoins de la Sicile. » Ce conseil poussait ses idées sur la décentralisation jusqu’aux limites du fédéralisme. Dans le projet qu’il rédigea, le gouverneur de la région, sous le nom de lieutenant, avait des prérogatives vraiment royales; quant à l’assemblée élective qui représentait la région, elle formait un véritable parlement. Ces doctrines excessives effrayèrent les esprits et contribuèrent à augmenter le discrédit dans lequel finirent par tomber les partisans de l’idée régioniste. Tout au plus quelques-uns, pour ne point s’avouer complètement vaincus, arguent de l’isolement des îles de Sicile et de Sardaigne, et demandent pour elles un régime exceptionnel; mais la Sardaigne repousse cette idée avec énergie. On peut donc dire qu’il n’est plus question de partager l’Italie en grandes circonscriptions correspondant aux anciens états, et qu’elle restera divisée en provinces dont l’étendue et la condition administrative peuvent être comparées à celles des départemens français[1].

Quant à l’organisation municipale, il était naturel, d’après les indications que nous avons données en commençant, qu’elle tînt une grande place dans tous les projets agités au sujet de la constitution administrative du royaume. Tout le monde s’accordait pour demander que de grands privilèges fussent concédés à la commune. On citait volontiers comme modèle la commune belge : le conseil municipal a le droit de se réunir, si un tiers des conseillers le demande; les séances sont publiques ; les délibérations du conseil ne peuvent jamais être cassées par l’autorité administrative, mais seulement suspendues et déférées au conseil provincial; le bourgmestre comme ses conseillers sont nommés directement par les électeurs. Une des principales préoccupations des publicistes était de faire en sorte que la commune eût des dimensions convenables, assez restreintes pour garder son homogénéité, assez étendues pour conserver quelque force politique ou économique. Dans certaines parties de l’Italie, en Toscane, dans l’Emilie, dans l’Ombrie, dans les Marches et même dans les provinces méridionales, la fusion des petites communes a été faite tant bien que mal par les gouvernemens déchus; mais dans les anciennes provinces et dans la Lombardie l’étendue moyenne du territoire communal est restée trop petite. Cette partie du royaume, qui ne compte pas beaucoup plus de 7 millions d’habitans, est divisée en près de 4,500 communes; elle renferme plus de la moitié du nombre total des communes de l’Italie actuelle, tandis qu’elle

  1. Il y a maintenant en Italie cinquante-neuf provinces, assez inégales sous le rapport de la population et de la superficie : elles ont été instituées successivement, au jour le jour, sans plan d’ensemble; peut-être faudra-t-il procéder à un remaniement général des limites de ces provinces, mais ce n’est là qu’une question secondaire.