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DES PROGRÈS
DE LA MÉCANIQUE

M. LÉON FOUCAULT.

L’Évangile a dit : « Celui qui croit ne sera pas jugé. » Les savans devraient s’inspirer de cette maxime et dire à leur tour : Celui qui trouve ne sera pas jugé. Toute méthode qui fait trouver doit être accueillie avec reconnaissance, et quiconque apporte une vérité nouvelle doit toujours être bien reçu. Les voies de la science sont infinies, et le plus grand préjudice que l’on puisse lui porter est d’en proscrire quelques-unes en décourageant par un injuste dédain ceux qui les suivent ou les développent. Plus large et plus féconde sera la voie dans laquelle un grand homme aura engagé ses contemporains ou la postérité, plus méritans et plus utiles seront souvent les esprits rebelles qui, refusant le joug, persisteront dans les vieilles méthodes ou sauront s’en créer de nouvelles.

Deux puissans génies ont à des époques différentes changé la face de la géométrie et celle de la mécanique. Descartes et Lagrange, à deux siècles d’intervalle, ont créé, l’un la géométrie analytique, l’autre la mécanique analytique ; ils ont montré comment le calcul algébrique et l’analyse infinitésimale embrassent dans leurs combinaisons la solution de tous les problèmes de géométrie et de mécanique, sans qu’il soit nécessaire de recourir aux raisonnemens faits sur la figure ou inspirés par l’étude profonde des mécanismes, comment on peut espérer d’obtenir la proportion des figures et des mouvemens au moyen de règles uniformes qui remplaceraient le génie du géomètre par la patience du calculateur.