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« Je n’ai certes nulle mission pour vous faire une déclaration de guerre éventuelle ; mais, si vous avez la moindre confiance dans l’intelligence que j’ai des intérêts de la politique de mon pays, tenez pour certain, sur ma parole, qu’un corps de troupes autrichiennes en Piémont y rencontrerait bientôt une armée française. »

« Cette vivacité tranchante, qui n’est pas dans mes habitudes de discussion, a paru faire impression sur le prince de Metternich. »

Cette attitude si digne, ce langage à la fois si calme et si ferme, n’étaient-ils pas dès lors la mise en pratique de cette politique pacifique qui a inspiré les nobles pensées si bien exprimées naguère par l’empereur et le corps législatif, quand ils ont proclamé, dans une heureuse conformité de langage, que « la France ne devait tirer l’épée, sans concert préalable, que dans le cas d’une offense à son honneur ou d’une menace contre ses frontières. » Cette attitude, ce langage suffirent d’ailleurs pour paralyser les desseins hostiles de l’empereur de Russie, qui devait plus tard chercher une satisfaction dans la question d’Orient. Le roi de Prusse fut le premier à prendre son parti du mauvais succès de la triple démarche faite en commun avec l’Autriche et la Russie. L’Autriche modifia bientôt après son langage et ses dispositions. La Russie resta isolée et impuissante dans son mauvais vouloir. La sainte-alliance était décidément morte, et la France trouvait pour la première fois en face d’elle une bonne volonté dont le roi de Prusse ne tarda point à lui donner un éclatant témoignage en favorisant le mariage du prince que la France a pleuré en 1842 avec une princesse qu’il aimait comme une fille, et qui était digne du rang où semblait l’appeler la Providence.

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Le mot de persévérance, si justement applicable au gouvernement du roi Louis-Philippe quand on considère sa politique dans certaines questions extérieures, ne l’est pas moins quand on examine la pensée de son règne en ce qui touche le développement de la force de résistance et d’action du pays par l’entreprise gigantesque des fortifications de Paris. Cette pensée du reste, n’était pas seulement celle d’un règne ; c’était la pensée d’une vie tout entière.

« Que de fois, me disait le roi Louis-Philippe, que de fois en 1792, dans les plaines de Champagne et de Belgique, le lendemain même des combats qui nous consolaient par la victoire des douloureuses nouvelles que nous recevions de Paris, j’ai songé avec amertume qu’une bataille malheureuse amènerait bientôt sous ses murailles les armées étrangères qui les trouveraient sans défense !

« En 1814, j’insistais près de Louis XVIII en lui démontrant qu’après la constitution qu’il venait de donner au pays, il ne pouvait rien faire de plus national et de plus populaire que de rendre le cœur de la France invulnérable en plaçant Paris sous la protection d’une enceinte d’ouvrages défensifs.