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repose sur la direction des courans aériens. Je n’ai point l’intention d’exposer en détail un système qui a déjà été expliqué dans la Revue[1], je ne veux qu’en rappeler les principaux traits. Tantôt les courans d’air circulent côte à côte durant des centaines et des milliers de milles, mais en suivant des directions opposées, ainsi que des trains de wagons qui se croisent sur deux lignes de fer parallèles ; tantôt au contraire ils se superposent les uns aux autres, souvent ils se traversent à angles inégaux ; d’autres fois ils se combinent, et en associant leurs forces ils produisent ces variations de l’atmosphère si fréquentes quand le vent souffle de l’équateur ou du pôle le plus voisin. Tel est quelquefois l’antagonisme de ces courans dans leur collision angulaire qu’ils donnent lieu à de larges tourbillons, sorte de tempêtes tournoyantes qui sont les plus terribles de toutes dans le monde entier. Les calculs de l’amiral Fitz-Roy consistent à prédire l’arrivée d’un de ces courans atmosphériques à une station donnée. La nouvelle est alors communiquée par le télégraphe à tous les points menacés qui se trouvent sur la côte. Télégraphier la tempête, c’est une prétention qui rencontre encore, je dois le dire, plus d’un incrédule. Quoi qu’il en soit, des signaux d’alarme ou de précaution (cautions signals), bien connus aujourd’hui des marins, aussitôt sont arborés sur toutes les stations maritimes. Ces signaux consistent surtout en un cône et un tambour faits l’un et l’autre avec de la grosse toile, peints en noir et garnis à l’intérieur de cerceaux. Le tambour, appelé tambour de tempête (storm-drum), indique l’événement; le cône, qui est placé au-dessus du tambour, annonce la direction probable du vent qu’on doit attendre. Dans le cas où le danger est imminent, on ajoute un second cône. La nuit, on donne le signal au moyen de lumières placées en forme de triangles ou de carrés. L’amiral Fitz-Roy est en Angleterre une sorte de ministre de la météorologie : il a sous ses ordres un budget, un état-major, les fils électriques. Son système coûte à l’état 5,800 livres sterling par an. L’art de lire dans les élémens ne se prouve que par les faits, et ces faits sont assez nombreux pour avoir inspiré, du moins aux marins anglais, une véritable confiance. Dès qu’ils aperçoivent le tambour noir flottant dans le ciel, ceux d’entre eux qui étaient sur le point de lever l’ancre la laissent pesamment retomber sur le lit du port et attendent que le danger soit passé.

Les life-boats ne sont pas les seuls appareils de sauvetage qui existent en Angleterre. Certaines côtes de la Cornouaille par exemple sont tellement hérissées de rochers, entre lesquels se tourmente la mer, que le meilleur canot court les plus grands dangers et ne

  1. Voyez sur les Prédictions météorologiques la Revue du 1er septembre 1863.