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glorieuses expériences ? Non certes ; il faut respecter l’usage, car l’usage a souvent une illustre origine. N’oubliez pas cependant que les usages s’altèrent, se confondent, parce que nous n’en savons pas toujours le véritable sens, et que les esprits créateurs d’où ils émanent ont rarement livré leurs secrets. « Gustave-Adolphe a créé une méthode que ses disciples ont suivie, et ils ont fait tous de grandes choses. Depuis ce temps-là, nous avons dérogé successivement, parce que l’on n’avait appris que par routine. De là vient la confusion des usages, où chacun a ajouté ou retranché… J’approuve la noble hardiesse du chevalier de Folard, qui a été le seul qui ait osé franchir les bornes des préjugés. Rien n’est si pitoyable que d’en être l’esclave ; mais il va trop loin : il avance une opinion qui détermine le succès sans faire attention que ce succès dépend d’une infinité de circonstances que la prudence humaine ne saurait prévoir. Il suppose toujours les hommes braves sans faire attention que la valeur des troupes est journalière, que rien n’est si variable, et que la vraie habileté d’un général consiste à savoir s’en garantir par les dispositions, par les positions, et par ces traits de lumière qui caractérisent les grands capitaines. Peut-être s’est-il réservé cette matière, qui est immense ; peut-être aussi n’y a-t-il pas fait attention. C’est pourtant de toutes les parties de la guerre la plus nécessaire à étudier. » Quant à lui, dans ces pages rapides, il tâchera d’être complet. Deux livres composent son manuel et correspondent exactement aux divisions naturelles de la mécanique de la guerre ; l’un traite des parties de détail, l’autre des parties sublimes.

On n’attend pas de nous l’analyse et encore moins la critique des Rêveries du comte de Saxe. C’est aux gens de l’art à commenter ce curieux ouvrage et à en marquer la place dans la littérature militaire. Il a été trop exalté par les uns, trop rabaissé par les autres. Celui-ci ne craint pas d’affirmer, que les Rêveries attestent un écrivain militaire du premier ordre ; celui-là n’y voit que « la boutade d’un homme de génie, une bluette de grand seigneur, enfin un opuscule bien au-dessous de la réputation que des adulateurs ont faite à Maurice de Saxe en le saluant du titre d’auteur. » Un juge compétent, M. de La Barre Duparcq, s’élève à la fois contre ces éloges sans mesure et ces blâmes sans justice ; il admire la sagacité, le bon sens pratique, fruit d’une longue expérience, qui décorent maintes pages du livre. M. de La Barre Duparcq aurait pu conclure plus favorablement encore d’après le commentaire qui précède son jugement ; n’y a-t-il que du sens pratique et de la sagacité dans un ouvrage écrit sous l’impression de la fièvre et où l’auteur a devancé quelques-unes des conceptions du vainqueur d’Arcole et de Rivoli ? N’est-ce pas lui qui a proclamé ce principe « que tout le secret de