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se sont écoulées de longues années, et les résultats obtenus dès le début sont de nature à les faire persévérer dans la voie inaugurée en 1851. Le crédit relevé, des ports creusés, de belles chaussées et de grandes lignes de chemin de fer qui unissent la capitale aux principales villes du royaume, tels sont les résultats des premiers efforts.

Il y a quelques années encore, le Portugais se voyait forcé de voyager à cheval. C’est vers 1855 qu’il sentit enfin la nécessité de recourir aux nouveaux moyens de transport et de locomotion. Il appela donc à son secours les capitaux étrangers, il livra son territoire aux ingénieurs, qui lui vinrent de tous côtés, et les chemins de fer sillonnèrent le royaume. Lorsque l’on voit aujourd’hui la transformation produite par un mouvement auquel on a pris soi-même une part active, si petite qu’elle soit, il est peut-être permis de s’y arrêter avec complaisance. Le réseau lusitanien que parcourt la locomotive ne comprend pas moins de 700 kilomètres. Le chemin de fer du Sud, qui de Lisbonne se dirige vers Evora et Bejà, atteint un développement de 192 kilomètres, tous livrés à la circulation. La ligne du Nord-Est est de beaucoup la plus importante, puisque sur un parcours de 510 kilom. elle a eu à traverser de grands fleuves, de hautes montagnes, et souvent des marais pestilentiels. Entreprise en 1860 par M. J. de Salamanca, le riche capitaliste espagnol, elle a relié en 1864 la capitale portugaise d’un côté à Santarem, Abrantès, Elvas et Badajoz, tandis que de l’autre elle a ouvert de faciles communications entre Lisbonne, Coïmbre et Porto. Tout cela n’a pas coûté moins de 80 millions de francs au gouvernement portugais, et, loin de s’arrêter, le voilà projetant des lignes nouvelles pour aider au transport des vins du Douro, qui de Regoa se dirigent vers Porto, ou pour faciliter la sortie des produits agricoles et minéraux de l’intérieur du pays.

Ce n’est pas à dire assurément que l’avenir réserve au Portugal les pages brillantes de son passé, mais il peut retrouver la place à laquelle lui donnent droit sa situation et ses 4 millions d’habitans. Resserré du côté de la terre, le Portugais a devant lui la mer pour s’étendre ; il est intelligent et laborieux. Pourquoi ne fonderait-il pas sur les côtes d’Afrique, dans les provinces d’Angola, des établissemens où son commerce puisse se développer ? Au reste, à lui s’ouvre encore l’empire brésilien, vers lequel l’entraînent des traditions de famille. Le Brésil, en se séparant de la métropole, n’a pas établi ces barrières de haine et de jalousie qui s’élèvent lorsqu’une colonie s’affranchit par la force. Brésiliens et Portugais associent volontiers leurs intérêts : pendant que celui-ci va chercher fortune sur les plages de Rio, de Parana et de Pernambouc, celui-là