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c’est le produit des dépôts successifs abandonnés par les eaux qui sont surchargées de sels de soude et de chaux. Le même effet a été observé déjà, on le sait, dans bien d’autres contrées. Les eaux de source sont aussi imprégnées de gaz, d’hydrogène carboné sans doute, qui leur donne une odeur désagréable. Cependant elles sont potables, et la région dont il s’agit, à part la sécheresse de l’été et la rareté de la végétation en certaines parties sablonneuses, convient bien à l’industrie pastorale qui s’y est déjà introduite. La nature saline du terrain paraît être plutôt favorable que nuisible aux bestiaux. La seconde région, comprise entre les 27e et 17e degrés de latitude, ne produit guère qu’une grosse herbe de saveur acre, que les colons désignent sous le nom « d’herbe de porc-épic. » Cette plante pousse d’habitude entre les buissons et indique un sol pauvre ; cependant les troupeaux s’en contentent. Au fond des ravins, on trouve des pâturages plus riches et des gommiers. La contrée offre l’aspect d’une plaine coupée par des chaînes de collines qui ne s’élèvent pas à plus de 500 ou 600 mètres. L’eau est rare ; peu de rivières conservent de l’eau pendant toute l’année, et la plupart ne sont que des mares stagnantes. Stuart ayant retrouvé d’une année à l’autre les traces de son passage sur le sol, il paraît probable qu’il n’y a pas de saison pluvieuse régulière, et que la faible quantité de pluie qui tombe accidentellement est bientôt enlevée par l’évaporation. Enfin la troisième région, qui s’étend entre le 176 degré de latitude et la mer des tropiques, présente d’abord des plaines d’alluvions assez fertiles où les arbres sont cependant encore rabougris, puis des vallées d’un bon sol noirâtre où la végétation est luxuriante, où l’eau est abondante, où les productions variées des tropiques croissent sans soins et sans culture. La canne à sucre et le cotonnier pourront se développer là sur d’immenses surfaces qui leur conviennent au mieux. Les indigènes paraissent aussi être beaucoup plus nombreux dans cette dernière région crue partout ailleurs. Petits, maigres, chétifs, sauvages, mais rarement hostiles, ils redoutent d’instinct l’approche des blancs, et allument devant eux de grands feux de broussailles et d’herbes sèches, comme s’ils voulaient arrêter ces intrus qui leur raviront un jour les domaines dont ils jouissaient paisiblement jusqu’alors.

Tels sont les voyages qui ont fait à Stuart une réputation brillante au nombre des plus intrépides explorateurs de l’Australie. Le premier, il a su rompre le charme qui enveloppait encore le centre du continent. Il a montré aux colons d’immenses espaces à occuper, il a accompli ces pérégrinations périlleuses sans jamais compromettre la vie de ses compagnons ; mais il n’eut pas le mérite d’être le premier à traverser le continent d’une mer à l’autre. Au moment