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nus agrémens pittoresques, et que les disciples d’un art sévère n’ont pas tous disparu de notre école. Elles méritent à ce titre d’être tenues en sérieuse estime et d’être comptées parmi les œuvres les plus recommandables produites dans notre pays depuis que le pinceau est tombé des mains du peintre religieux par excellence, depuis la mort d’Hippolyte Flandrin.

HENRI DELABORDE.


UN ESSAI DE DRAME RÉALISTE EN ITALIE[1].


Rien n’est rare comme un auteur italien disposé à comprendre que les sévérités de la critique sont plus utiles à ses œuvres et à lui-même que ne serait le silence fait autour de ses livres et de son nom. Pour ne parler aujourd’hui que du théâtre, l’usage ne permettant guère, en Italie, qu’un ouvrage dramatique, fût-il un chef-d’œuvre, soit représenté plus de trois ou quatre fois, il semble que les écrivains devraient demander à la presse une plus large publicité. En général cependant, ils n’impriment point, soit par défiance d’eux-mêmes ou par économie, soit parce qu’ils se persuadent qu’un ouvrage écrit pour la scène ne peut que perdre à la lecture.

Voici néanmoins une exception, et il faut avant tout féliciter M. Alcide Oliari de comprendre ses intérêts autrement que ne font la plupart des représentans actuels de la littérature dramatique en Italie. Il y a quelques années, dans un travail sur le théâtre italien, nous faisions ici même mention d’un drame de M. Alcide Oliari, Béatrice Cenci, qui avait vu le jour, comme les proverbes de Musset, en dehors de la scène. Nous serions bien trompé si le nouveau drame de cet auteur, Zita di Narni, avait eu d’autres destinées. Écrit, ainsi que le précédent, avec un soin qu’on néglige généralement en Italie, quand on y écrit pour le théâtre, ce nouvel ouvrage, à en juger par quelques lignes extraites d’une lettre intime et qui servent de préface, ne serait que le développement dialogué d’une anecdote venue, peu importe comment, à la connaissance de l’auteur. C’est donc, dans la force du terme, un drame réaliste, et M. Oliari a voulu bien évidemment être tributaire du fait. Nous ne pouvons vraiment que le regretter pour lui : on a beau en effet chercher son sujet dans les réalités de la vie journalière, l’y choisir, et par conséquent le trouver à son gré ; on n’en est pas moins à la gêne, sans parler du danger auquel on s’expose de faire un mauvais choix. C’est, nous le craignons, ce qui est arrivé a M. Alcide Oliari. L’anecdote dont il a fait un long drame en cinq actes n’est autre que l’éternelle histoire de la jeune fille du peuple séduite par un beau gentilhomme, délaissée après sa faute et mourant de désespoir. Quelle difficulté de rajeunir un pareil sujet, et de le traiter sans monotonie avec trois personnages ! Nous ne savons si le public italien pense que M. Oliari a rajeuni cette fable par la manière dont il l’a traitée, mais nous serions porté à croire le contraire, car, en lisant l’ouvrage avec attention, tout ce qui nous

  1. Zita di Narni, dramma in cinque atti, di Alcide Oliari. Milano 1864.