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gumentation aussi animée et pressante. « J’engageai M. Hall, raconte lord Wodehouse, à bien peser la gravité des dangers qui menaçaient le royaume. Il était de mon devoir de lui déclarer que, si le gouvernement danois repoussait notre conseil, le gouvernement de sa majesté devait laisser le Danemark s’engager dans la lutte avec l’Allemagne sous sa propre responsabilité. » M. Hall répondit qu’il ne connaissait que trop les dangers dont le Danemark était menacé, s’il repoussait le conseil de l’Angleterre ; mais les dangers qu’il courait en l’acceptant étaient encore plus graves… « Maintenant le roi et son peuple étaient unis, et cette union cordiale du roi et du peuple avait la puissance d’une forteresse : si la constitution était abolie, ce grand avantage serait perdu. » Passant ensuite aux divers modes d’exécution, le ministre danois démontrait que le rigsraad allait expirer légalement dans vingt-quatre heures, et qu’il était inutile de vouloir prolonger ses séances, puisqu’on n’obtiendrait jamais de lui un vote favorable à l’abrogation. Il faudrait donc réunir un nouveau parlement, faire procéder à des élections ; mais outre que de tels préparatifs demanderaient beaucoup plus de temps que n’en accordait l’ultimatum de Berlin (le 1er janvier, et on était au 20 décembre !), outre aussi qu’il était fort douteux que le rigsraad futur se montrât moins récalcitrant, la nouvelle assemblée ne pourrait, dans tous les cas, être convoquée qu’au nom de la constitution de novembre : or M. de Bismark avait déclaré que toute mise en pratique de la constitution de novembre serait considérée par lui comme un casus belli. On tournait dans un cercle vicieux… Lord Wodehouse, il est vrai, « espérait » pouvoir obtenir une prolongation du fatal délai qui rendrait la réunion d’un nouveau rigsraad possible, pourvu, bien entendu, que les membres du Slesvig ne fassent pas appelés à y prendre place, — c’est-à-dire pourvu que l’on tranchât d’avance la question sur laquelle on se donnerait l’air de vouloir consulter le pays ! « Il n’est pas d’usage, s’écria M. Hall, de convoquer un parlement dans la seule pensée de lui faire commettre un suicide !… » Et il finit par demander quel était l’équivalent qu’on lui offrait en échange d’un sacrifice aussi immense, aussi plein de périls ? Promettait-on au moins que ce serait là le terme des concessions imposées ? On n’avait pas même la certitude de voir toute la question déférée à un verdict de l’Europe ; on n’avait pas même l’assurance que le Slesvig ne serait point envahi malgré le rappel de la constitution !… Comme dernier expédient, le ministre danois proposa de suspendre la constitution jusqu’au 1er janvier 1865 ; on aurait ainsi toute une année devant soi pour négocier. Lord Wodehouse trouva que l’idée n’était pas tout à fait mauvaise (not altogether a bad one) ; il ne lui donna pas de suite pourtant, et M. Hall finit par se démettre de