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LE
CERVEAU ET LA PENSÉE

II.
DONNÉES PHYSIOLOGIQUES ET INDUCTIONS PHILOSOPHIQUES.
FOLIE. — LOCALISATIONS. — MÉCANIQUE CÉRÉBRALE.

Nous avons un oubli à réparer. Parmi les différentes circonstances par lesquelles on a cherché à expliquer la diversité et l’inégalité des intelligences, nous avons négligé de rappeler la composition chimique du cerveau, qui a cependant attiré l’attention de quelques observateurs[1]. Ces recherches ont même donné naissance a une théorie très répandue, et que M. Moleschott a exprimée en ces termes : « sans phosphore, point de pensée. » Le phosphore est devenu le grand agent de la pensée et de l’intelligence, le stimulant universel, l’âme elle-même. Un célèbre romancier avait déjà exposé cette théorie dans la Recherche de l’absolu. « L’homme, disait-il, est un matras. Selon moi, l’idiot est celui dont le cerveau contiendrait le moins de phosphore ; le fou, celui dont le cerveau en contiendrait trop ; l’homme ordinaire, celui qui en aurait peu ; l’homme de génie, celui dont la cervelle en serait saturée à un degré convenable. » En Allemagne, Feuerbach avait pris tellement au sérieux cette théorie du phosphore qu’il n’hésitait pas à signaler comme une cause de l’affaiblissement des caractères en Europe l’usage exagéré de la pomme de terre, qui contient peu de phosphore. Pour régénérer les peuples et relever le tempérament moral de l’humanité, il proposait

  1. Voyez la Revue du 15 juin.