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Il faut maintenant comparer la richesse des États-Unis avec le montant de la dette qu’auront à supporter les Américains jusqu’en 1900, en supposant, ce qui est tout à fait improbable, que nul remboursement du capital de 3 milliards de piastres n’ait été encore opéré à cette époque. Le taux de l’accroissement décennal dans la fortune publique est évalué à 100 pour 100 au lieu de 126 pour 100, qui est le taux de la dernière période de recensement.


PROPORTION DE LA DETTE A LA RICHESSE NATIONALE.


Années Population Richesse publique Richesse moyenne par tête Dette annuel par tête Intérêt annuel par tête Proportion de la dette à la richesse
1860 31,445,080 87,258,600,000 2,754
1865 34,000,000 116,499,600,000 3,426 444 69 28 89 13,90 pour 100
1870 40,950,000 174,517,200,000 4,261 395 60 23 65 9,28
1880 53,235,000 349,034,400,000 6,556 304 29 18 25 4,64
1890 69,205,500 698,068,800,000 10,141 234 52 14 04 2,32
1900 89,964,150 1,396,137,600,000 15,514 180 04 10 80 1,16

On le voit, la richesse publique est destinée à s’accroître rapidement, et le poids de la dette doit diminuer en même temps pour chaque citoyen. L’histoire moderne de la Grande-Bretagne présente un fait analogue, puisque dans les quarante-neuf années qui se sont écoulées de 1816 à 1865 la proportion de la dette nationale à la richesse publique s’est abaissée graduellement de 40 à 10 pour 100, tandis que la dette elle-même n’a pas diminué de 800 millions sur un capital primitif de 21 milliards de francs. Et pourtant les progrès en richesse de la Grande-Bretagne ont été singulièrement distancés par ceux de la république américaine.

Après avoir montré quel est actuellement et quel sera dans l’avenir le poids de la dette sur les habitans des États-Unis, il importe de mettre cette charge en regard de celle que supporte l’Angleterre. A la fin des grandes guerres européennes, en 1816, la dette de l’Angleterre s’élevait à vingt et un milliards vingt-cinq millions de francs, répartis sur une population totale de 19,275,000 habitans : c’était donc environ une somme de 1,090 francs par personne. Actuellement la charge que chaque Anglais doit porter dans la dette nationale a diminué dans une forte proportion ; mais elle est encore plus considérable quant au capital et à peine moins élevée quant à l’intérêt que ne l’est celle de l’Amérique. En réfléchissant aux immenses ressources de la république et à la grande supériorité matérielle que lui réserve l’avenir sur les diverses contrées d’Europe, on ne saurait douter que les obligations des États-Unis ne prennent honorablement leur rang dans les marchés monétaires à côté des consolidés, des rentes et des fonds publics les mieux cotés, d’autant plus que le taux élevé de leur intérêt constitue un placement beaucoup plus rémunérateur.