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la déroute des alliés de Würzbourg devint complète. Le roi de Bavière Maximilien Ier ne put survivre à une pareille honte. Il tomba malade le 8 mars ; il mourut deux jours après, « le cœur brisé (am gebrochenen herzen), » ainsi que s’exprimait la presse officieuse de Munich, et ce fut là peut-être le seul trait émouvant et respectable de l’histoire allemande dans ce piteux imbroglio… Chose triste à dire, il semblait que la mort se fût mise au service de M. de Bismark pour lui aplanir les voies. En frappant au mois de novembre le roi Frédéric VII de Danemark, elle avait ouvert à l’heureux ministre les riantes perspectives de la conquête ; elle le délivrait maintenant d’une ligue embarrassante, sinon dangereuse, des princes allemands en leur enlevant le chef désigné.

Le décès de Maximilien Ier sonna le glas funèbre de la troisième Allemagne, qui dès lors ne vit plus autour d’elle que l’abandon et le vide. Ce n’est pas certes le prince Gortchakov qu’elle pouvait invoquer, le désir constant de la Russie étant, ainsi que l’écrivait déjà lord Napier le 11 janvier, « que l’Autriche et la Prusse réassumassent leur contrôle sur le Bund. » L’Angleterre n’avait pas non plus de raisons pour s’intéresser à ces états secondaires qui l’avaient tant irritée, malmenée même, et puis, avec son ordinaire sagacité, la diplomatie britannique voyait dans la « déclaration-proposition » du 25 février un événement « favorable » pour le Danemark. « Cette motion, écrivait M. Howard à lord Russell le 27 février, est sans nul doute une contre-mine pour la conférence de Würzbourg, et elle peut avoir un résultat important, si l’Autriche et la Prusse sont honnêtement disposées (if they are honestly disposed). » Restait le Welche, la grande puissance voisine, bienveillante, à ce qu’on affirmait, — dangereuse pourtant, — éminemment suspecte au patriotisme teuton et plus apathique en apparence que jamais ! On se décida pourtant à faire une tentative de ce côté, et le duc de Cobourg vint le 11 mars 1864 à Paris. Ce singulier personnage, qui avait commencé par incorporer ses soldats dans l’armée prussienne et par prôner l’hégémonie de Guillaume Ier, qui ensuite s’était déclaré « démocrate et ne comptant tenir son rang que de la volonté du peuple, » qui plus tard avait de nouveau acclamé l’empereur François-Joseph le restaurateur de la grande patrie, ce protecteur du National Verein et « des mangeurs de glands et de Français, » venait maintenant demander à un Napoléon de sauver les libertés de l’Allemagne ! Et, retour plus étrange encore des choses d’ici-bas, les « mangeurs de glands » ne s’offusquaient pas de cette démarche faite auprès « de l’ennemi héréditaire ; » seul, le vieux Wrangel parlait d’arrêter le déserteur à son retour, — car le prince était toujours général prussien ! Reçu dans la capitale de France avec