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partie du clergé, car il ne faut pas oublier que dans les campagnes surtout les recteurs avaient presque seuls la direction des écoles. Ce n’est donc point sans inquiétude qu’ils virent à la suite et à la faveur des secours se glisser dans l’instruction primaire le contrôle de l’état. Le revised code (c’est le nom qu’on donne aux nouveaux règlemens) est célèbre en Angleterre par les objections qu’il a soulevées de la part de l’église. Parmi ces griefs, il en est sans doute d’exagérés ; il faut pourtant le reconnaître, le gouvernement s’est préoccupé d’étendre, et non d’élever le niveau de l’éducation du peuple dans les écoles. Le programme d’études conçu et appliqué avant ces derniers temps dans certains villages par quelques clergymen était beaucoup plus libéral que celui du conseil privé[1].

Quoi qu’il en soit, l’action des pouvoirs civils ne ressemble en rien dans cette circonstance à ce qu’on appelle chez nous intervention de l’état. D’abord on est libre de repousser une telle intervention en renonçant aux avantages matériels qui s’y rattachent, et ensuite elle n’absorbe point l’autonomie des localités. Deux forces agissent ici de- concert, la société et la paroisse, — ce que nous appelons en France la commune. Le système de contributions volontaires, quand il fonctionne seul, présente un inconvénient : il fournit aux districts riches l’aide et l’assistance qu’il retire aux districts pauvres. Les sources de la charité ressemblent alors à ces torrens qui s’emplissent pendant l’hiver, lorsque l’eau est partout en abondance, et qui se dessèchent pendant l’été, lorsqu’on aurait le plus besoin de leurs services. Aujourd’hui, grâce & la distribution des fonds publics, cette inégalité existe beaucoup moins, car l’école primaire se trouve soutenue par trois branches de revenus : — ce que souscrit la paroisse, ce que paient les enfans, et ce que donne l’état.

Une partie du clergé anglais accuse surtout le gouvernement de lui avoir tendu un piège et de s’être servi de ses dons pour séculariser l’éducation primaire. Qu’y a-t-il de vrai dans ce reproche ? L’église et les sectes dissidentes ont un droit égal à solliciter les subsides de l’état, et leurs demandes sont accueillies avec la même faveur. Dans tous les endroits où se rencontrent en même temps un nombre suffisant de churchmen (partisans de la religion dominante) et un groupe assez fort de dissenters) il n’y a guère lieu à aucune difficulté : on voit alors s’élever deux écoles. Il s’en faut pourtant de beaucoup qu’il en soit ainsi dans tous les villages. La richesse est d’ordinaire entre les mains de ceux qui professent la

  1. On se borne aujourd’hui, dans ces écoles, a enseigner la lecture, l’écriture et l’arithmétique. Le plan tracé vers 1859 par plus d’un recteur de campagne embrassait bien d’autres branches des connaissances humaines.