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découvrir, un léger feu de tirailleurs ; un feu semblable suffit pour les maintenir dans cette position défensive, tandis que les troupes pénètrent dans la batterie. C’est un fort bel ouvrage, construit avec un grand soin, suivant les profils de notre fortification moderne ; les quatre faces sont armées collectivement de quatorze pièces en bronze, dont dix pièces sur affût de côte, une pièce sur affût de campagne, et trois obusiers de gros calibre. Du côté de la colline, une forte palissade entoure l’esplanade de la batterie ; plusieurs puits, une poudrière, trois ou quatre casernemens en planches complètent son emménagement. A cent pas dans la colline, un grand magasin à poudre protégé par un pli de terrain renferme un amas considérable d’obus, de la poudre et des armes, principalement des arcs et des flèches.

De cet ouvrage à l’entrée de Simonoseki, la côte est dépourvue de batteries ; nous occupons donc en ce moment, à l’exception de l’extrémité de Kousi-saki, toutes les défenses de la première partie du détroit. La ville nous est masquée par le retour du terrain ; sur la côte opposée, une grande baie, faisant suite au cap Mozi, se déploie jusqu’au pied des hautes montagnes de Kokoura. Dans l’ouest, l’île d’Hikousima, complétant avec la ville les contours de cette partie renflée du détroit, nous paraît, à la lunette, armée de quelques ouvrages : l’un d’eux envoie des coups de canon, bravade inutile, vu la distance considérable qui permettrait tout au plus à nos boulets de l’atteindre.

Des détachemens sont envoyés en reconnaissance du côté de Simonoseki ; ils parviennent sur un plateau d’où l’on domine les faubourgs formant un cordon de maisons le long d’une rue parallèle à la mer ; au-dessus de cette rue, des escaliers conduisent à des pagodes et à des bonzeries entourées de bois. La ville paraît déserte et sans ouvrages de fortification, mais du haut des pagodes et des arbres un ennemi presque invisible entretient un tir irrégulier de mousqueterie. Les commandans en chef, après s’être portés sur ce plateau, donnent l’ordre de conserver simplement les positions occupées. La chaleur se faisant vivement sentir, les troupes se reposent et dînent ; puis, tandis que des cordons de tirailleurs se maintiennent dans la montagne, l’on procède à la destruction du matériel des batteries ; les poudres sont noyées, les affûts sont brisés et réunis en amas auxquels on met le feu ; le magasin à obus du grand ouvrage est incendié et fait explosion en couvrant les alentours de débris.

Vers deux heures de l’après-midi, une nouvelle reconnaissance est poussée sur le chemin qui longe la mer par nos fusiliers-marins et les Hollandais, appuyés des embarcations. Au bout de 400