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Silfverhielm, disciple de Mesmer, dont il avait suivi en France les enseignemens, se mit en devoir de magnétiser le duc. Reuterholm tenait la plume et notait par écrit les demandes et les réponses.


« Votre altesse royale est-elle endormie? dit l’opérateur après quelques minutes. — Oui. — Comment le baron Reuterholm doit-il se conduire pendant la diète? — Je vais consulter. — Après un moment de silence, le duc reprit J’ai consulté. Il faut que son attitude soit entièrement passive, et, s’il s’abstenait d’y paraître, ce serait le mieux. — Votre altesse peut-elle nous dire comment nous pourrions être le plus utiles à notre patrie? — Est-ce comme citoyens ou comme membres de notre confrérie que vous parlez? — C’est comme citoyens, — Il faut que la destinée s’accomplisse, ce qui est marqué s’accomplira; on ne l’évitera pas. Il faut que la terre soit purifiée. Et dans ce temps-là tous les royaumes seront transformés; ce qui arrive d’une façon en Suède arrivera d’autre manière avant peu en Russie. Les événemens de l’avenir sont longtemps à l’avance prévus et fixés. Ceux qui cherchent à s’y opposer ne font que courir à leur ruine. Votre altesse nous dira-t-elle quelque chose de plus à ce sujet? — J’en ai déjà dit peut-être plus que je ne devais. — De quelle manière pouvons-nous mettre à profit les informations que nous avons reçues? — Vous devez les garder pour vous-mêmes jusqu’à ce que le repos soit rendu à l’état; tout alors se révélera. Ce que je dis maintenant, pendant ce sommeil, est destiné à préserver mes amis, que les esprits malins ont voulu entraîner en de mauvais sentiers, mais qui doivent un jour aider avec moi à rétablir la paix du royaume et à éclairer le monde. Voici une chose qu’il faut que je vous dise pour mon propre usage. Je ne dois pas me mêler aux affaires de la diète; je dois rester passif. Si l’on en vient à des violences, je dois faire des représentations, et puis ne -plus prendre aucune part à ce qui suivra. Il vous faut écrire mot pour mot toutes ces réponses, afin qu’elles servent à mon instruction quand je m’éveillerai. Lisez-moi ce que je viens de prononcer, afin que je voie si ce que vous écrivez est exact, » Reuterholm commença de lire; mais le duc n’entendait rien il fallut que l’opérateur le remplaçât. Quand il eut fini « C’est bien, dit le prince, tout cela est fort régulier et me sera d’un grand secours quand je serai réveillé. » Silfverhielm lui demanda encore « Votre altesse a-t-elle quelques autres conseils à donner à ses amis? — Oui. Reuterholm doit se garder de tout orgueil, afin de ne pas tomber dans les mêmes fautes que les réprouvés. De Geer doit mettre de l’ordre dans ses affaires privées l’ordre enfante le salut. Quant au baron Bonde, il ne doit pas quitter le prince royal, car il est le seul honnête homme autour de cet enfant, Le sort du jeune prince et le mien sont étroitement unis. — Le baron Reuterholm peut-il être en quelque chose utile à son pays? — Certes; le temps approche où il sera nécessaire, et mon sort est entièrement lié au sien. Je vous dirai maintenant comment il faudra procéder lors de mon réveil. Il est possible que j’aie la curiosité de voir tout ce que j’ai dit vous ne devez pas me le montrer. A ma seconde demande sur ce sujet, vous me lirez les passages qui me concernent personnellement, rien de plus; vous emporterez ce procès-verbal et vous le conserverez avec soin sans me le montrer avant six ans