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lui rappelait le danger où avaient été ses affaires, la peine qu’il avait eue tant avec ses sujets qu’avec ses ennemis, et il l’engageait à saisir l’occasion d’imposer la loi à ceux qui voulaient la lui donner. Mais les offres portées par Ugo de Moncada, que la régente de France et son conseil repoussèrent comme excessives[1], l’empereur les regarda comme insuffisantes[2].

Déjà, sur le refus de ses propositions, Charles-Quint se préparait à reprendre la guerre. Il avait envoyé le commandeur Peñalosa en Angleterre pour resserrer l’union un peu relâchée avec Henri VIII, et obtenir de lui l’argent sans lequel ses troupes ne pouvaient pas être mises en mouvement[3], L’armée d’Italie, à laquelle il était dû plus de 600,000 ducats au moment de la bataille[4], n’avait pas été entièrement payée après la victoire, bien qu’il lui eût fait parvenir 80,000 ducats, et que ses généraux eussent imposé aux états italiens des contributions de guerre considérables en châtiment de leur abandon ou de leur infidélité[5].

Dispersée dans le haut de la péninsule, qu’elle pressurait, elle avait besoin d’être renforcée pour entrer en campagne. Charles-Quint le savait, et il cherchait de l’argent partout. Il en demandait à son clergé et à ses ordres de chevalerie, qui refusaient de payer la crusade, dont le pape n’avait pas autorisé la levée. Il s’adressait aux cortès afin que les procuradores des villes ajoutassent au servicio de 400,000 ducats qu’ils avaient voté. Ses sujets se montraient disposés à lui en accorder davantage, s’il consentait à se marier promptement afin d’assurer la succession aux couronnes d’Espagne en épousant une princesse qui pût lui donner tout de suite des enfans. Décidé à suivre leur vœu, il recherchait l’infante Isabelle de Portugal, qui devait lui apporter en dot 1 million de ducats d’or[6] ; mais, avant de s’engager avec elle, il avait à se

  1. « … Pour estre telles, les aucunes d’icelles quelles ne se pouvoient bonnement accorder, consentir ni permettre. » Instruction de Pierre de Warty, envoyé à Marguerite d’Autriche. — Négociations entre la France et l’Autriche, publiées par Le Glay, t. II, p. 607.
  2. Elles furent soumises à un conseil dont faisaient partie le chancelier Gattinara, le comte de Nassau, le grand-maître, le secrétaire Jean Allemand et communiquées aux ambassadeurs d’Angleterre. — State Papers, t. VI, p. 445, note 2.
  3. State Papers, t. VI, p. 438-444, 445.
  4. « Vu la grande dette qui monte bien à six cens mil escus qu’est du aux gens de guerre tant de pied que de cheval. » Lannoy à la gouvernante des Pays-Bas. — Négociations entre la France et l’Autriche.
  5. « Les choses à quoi prétendons sont que le pape et les Florentins payent 150,000 ducats pour leur part de la ligue, que les Vénitiens en payent 130,000 pour n’avoir pas joint leur armée. On travaille à tirer quelque chose de Sienne et de Lucques ; le duc de Ferrare prête 50,000 écus. » Ibid.
  6. Lettre de Charles-Quint à l’archiduc Ferdinand son frère, du 25 juin, — Bucholtz, t. II, p. 294 et sqq.