Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 61.djvu/881

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui avait révélé en lui conseillant d’être moins difficile sur les conditions de la paix avec le roi, la régente l’avait laissé entendre à son ambassadeur, Louis de Praet, dans l’espérance que cette crainte porterait l’empereur à se montrer plus accommodant[1] La lutte même avait commencé au-delà des Alpes. Pescara, qui, après avoir arrêté le chancelier Morone, assiégeait le duc Sforza dans la citadelle de Milan, n’était pas loin de sa fin, et la mort prévue de cet habile capitaine allait priver du chef le plus accrédité comme le plus résolu la petite armée avec laquelle l’Italie pouvait être contenue et la guerre entreprise. — L’empereur, dans un complet état d’isolement, loin de pouvoir envahir la France, serait obligé de se défendre dans la péninsule italienne, dont la possession lui serait de nouveau disputée, et dans les Pays-Bas, dont la pleine souveraineté lui échapperait. Il perdrait ainsi ce qui se trouvait gagné, et tout au moins aurait-il besoin de victoires nouvelles pour s’assurer des acquisitions qui étaient dues à ses victoires passées et qui allaient être ratifiées par un traité. Il se décida donc à accepter les avantages qui lui étaient concédés sous les conditions où ils lui étaient offerts ; mais il crut les rendre certains en rendant le traité inviolable. Prenant envers François Ier les sûretés les plus variées, il tint à l’engager comme père, comme roi, comme gentilhomme. Le père dut livrer ses deux fils aînés pour otages, le roi se lier par son serment et sa signature, le gentilhomme donner sa parole sous la foi de chevalier. François Ier adhéra à toutes ces précautions qu’il devait rendre inutiles.

Le traité aux dures, conditions duquel il avait donné l’ordre à ses ambassadeurs de se soumettre fut, le 19 décembre, dressé conformément à toutes les cessions convenues. François Ier promettait de le ratifier six semaines après être redevenu libre, de le faire accepter par les états et les parlemens du royaume en moins de quatre mois, et, s’il ne parvenait pas à effectuer les restitutions stipulées, il s’engageait à rentrer dans sa prison et à y reprendre la place du dauphin son fils aîné et du duc d’Orléans son second fils, qui, au moment de sa délivrance, seraient remis à l’empereur comme otages de sa fidélité[2].

  1. La régente lui a dit que le marquis de Pescaire était malade à mort, « aussi que merveilleuses choses se demeueroient en l’Italie, si elle y vouloit prester l’oreille, ce que non, sur espoir de bon traitement que ferez au roy son filz. » Lettre de L. de Praet à l’empereur, du 14 novembre, dans Lanz, t. 1er, p. 187.
  2. Dans Dumont, Corps diplomatique, t. IV, Ire partie, p. 400 et suiv.