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plongeur à la cloche (bell-diver) est gêné par une prison de fonte et de verre ; dans le second cas au contraire, le scaphandrier (diver with the diving-apparatus) fraie lui-même son chemin au fond de la mer.

L’histoire de cette dernière invention est très obscure[1] ; aussi je me hâte d’arriver aux temps modernes. Dans la cloche construite par Halley se trouvait déjà un appareil qui permettait au plongeur de s’aventurer à quelque distance et de rester un certain temps au fond de l’océan. Cet appareil consistait en une calotte de plomb avec des œillets de verre (eyelets), laquelle couvrait entièrement la tête et recevait l’air de l’intérieur de la cloche au moyen d’un tube flexible. Qui ne reconnaît ici le lien entre les deux systèmes ? Ne suffisait-il point de séparer ces deux branches pour que l’une d’entre elles se développât en une invention distincte ? En effet, vers 1798, un certain Kleingart de Breslau imagina un appareil qui, au lieu d’être enté sur la cloche, laissait au plongeur la liberté de ses mouvemens. Ce dernier portait sur le dos un vaisseau d’air, par exemple un sac en peau de chèvre gonflée de vent comme les outres d’Eole, et qui communiquait au masque par un tube. Cet instrument toutefois était encore trop grossier pour rendre de grands services. Il faut arriver au XIXe siècle, si l’on veut trouver une méthode qui ait enfin conquis un rang dans la science. En 1829, M. Siebe, ingénieur sous-marin, inventa, d’accord avec Charles et John Deans, le premier équipement de plongeur, diving dress equipment, où l’homme enseveli sous l’eau reçut de la surface sa provision d’air au moyen d’un tube et d’une pompe. Gann avait acheté le second de ces instrument qui eût alors été construit[2].

Tout cela sans doute était fort intéressant ; mais je fis observer à John Gann que je comprendrais beaucoup mieux la nature de ces appareils, si je les voyais en action. Je le priai donc de m’indiquer l’endroit où travaillaient alors ses hommes. Quelques-uns d’entre

  1. Vers 1721, un certain John Lethbridge avait construit un appareil en forme de tonneau avec deux trous pour passer les bras et un verre pour voir ce qui se passait dans la mer. Le plongeur avait besoin, pour travailler, de se coucher sur la poitrine et d’être souvent ramené à la surface pour respirer l’air frais. Les curieux trouveront de plus amples renseignemens sur cette machine dans le Gentleman’s Magazine, octobre 1749. Est-ce d’ailleurs bien là le germe des découvertes modernes ? Dans cet engin, comme dans plusieurs de ceux qui l’ont ou précédé ou suivi, on n’avait nullement pourvu au renouvellement de l’air.
  2. Cette invention s’est perfectionnée successivement. J’ai vu depuis lors chez M. Siebe, à Londres, 5, Denmark street, une série très curieuse de divers instrumens indiquant le progrès de cet art depuis le premier casque à plongeur qui ait été fabriqué jusqu’au présent appareil, qui venait d’obtenir une médaille à l’exposition de Dublin. C’est aussi un devoir pour moi de témoigner ma reconnaissance à cet excellent ingénieur pour les notes et les renseignemens qu’il a bien voulu mettre à ma disposition.