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de 10 millions, la plus-value des impôts, qui pourra être d’au moins 40 millions, puisque, les prévisions ayant été calculées sur les produits de 1865, cette plus-value sera celle de deux exercices, et en moyenne elle est de 20 à 25 millions par an. On pourra y affecter encore les annulations, qui sont portées à 24 millions pour 1866. À ces conditions, on aura toujours un budget en équilibre, mais ce sera un équilibre péniblement obtenu, qui aura absorbé toutes les ressources possibles, et s’il se présente d’autres dépenses extraordinaires que celles que l’on prévoit, il n’y aura plus rien pour y répondre, elles formeront un découvert. Ce sont là, il est vrai, les plus mauvaises chances ; si nous supposons maintenant qu’elles ne se réalisent pas toutes, que nous ayons par exemple évacué le Mexique avant le commencement de l’année prochaine, et qu’il ne nous manque que le paiement de l’indemnité de 25 millions, alors la situation devient plus favorable. L’équilibre est assuré ; on a même un excédant assez beau dont on peut faire profiter l’amortissement, en dehors de ce qu’on lui affecté spécialement cette année[1]. Cette question de l’équilibre n’est donc pas la grosse affaire du budget de l’année 1867 : c’est à l’égard de l’amortissement qu’il introduit une innovation importante.

Il y a plusieurs systèmes au sujet de l’amortissement. Il y a celui de certains financiers qui par ce mot entendent le remboursement, l’extinction totale de la dette. C’est en effet le véritable sens du mot « amortir ; » qui dit « amortir » dit « éteindre une dette. » C’est dans cet esprit-là qu’après avoir affecté un fonds spécial à l’amortissement en 1816, on l’a grossi successivement des intérêts de la rente rachetée, de façon à éteindre complètement la dette dans un temps donné. C’est le système imaginé par le docteur Price à la fin du siècle dernier, et d’après lequel, moyennant une dotation de 1 pour 100 à chaque emprunt, la dette se trouve rachetée au bout de trente-six ans. On comprend ce qu’il a de séduisant ; aussi a-t-il été adopté par l’Angleterre, par la France et par toutes les nations qui ont songé à éteindre leur dette. C’est encore cette théorie qui, sur une échelle moindre, préside au rachat successif des valeurs Industrielles qui doivent disparaître dans un temps donné. Avec une dotation annuelle de 18 à 20 centimes pour 100 francs, on peut amortir en cent ans une obligation ou une action remboursable à 500 francs.

  1. Il ne faut pas oublier non plus après tout que cette annuité de 25 millions dont le recouvrement nous paraît douteux figure au budget extraordinaire, et que, selon la théorie du sénatus-consulte de 1861, les dépenses de ce budget devant être subordonnées à ses ressources, on pourrait, si on le veut bien, ne rien enlever aux excédans naturels, et retrancher purement et simplement ces 25 millions de dépenses extraordinaires.