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LES VOIES ROMAINES EN GAULE.

verneurs des provinces se rendaient dans le pays dont le commandement leur était attribué ; ils voyageaient d’ordinaire avec un grand appareil, accompagnés d’une suite nombreuse. La centralisation romaine nécessitait un échange assez fréquent de lettres, et au service de l’état venaient se joindre la correspondance de famille, celle de l’amitié, dont les lettres de Cicéron nous ont laissé de si curieux témoignages. Des messagers, des courriers devaient ainsi se croiser à tout instant sur les routes de l’Italie. Rome, dont la population augmentait sans cesse, avait besoin d’approvisionnemens de plus en plus abondans. Sans doute la plus grande partie des blés et des produits étrangers que consommait la ville éternelle étaient apportés par mer, débarqués à Ostie et conduits dans la ville soit sur des barques qui remontaient le Tibre, soit sur des chariots qui encombraient la via Ostiensis ; mais la Gaule cisalpine, la Gaule narbonnaise, la Grande-Grèce commençaient à expédier plusieurs de leurs produits par ce que nous appellerions aujourd’hui le roulage. De lourds chariots, des bêtes de somme apportaient les denrées, les matières premières, les étoffes que le peuple romain demandait aux Gaulois, aux populations pastorales ou agricoles de l’Apennin et des Alpes. Les voies de l’Italie devaient donc offrir une circulation assez active. Dans les derniers temps de la république, des communications existaient entre presque toutes les villes principales de la péninsule. Les voyages étaient longs sans doute, si nous en jugeons par le tableau piquant qu’Horace nous a tracé de son voyage à Brindusium, mais ils étaient toujours possibles, et c’est là ce qui constituait, comparé à l’état ancien, un véritable progrès.

On comprend que l’importance de la viabilité ait fait de la voirie l’une des branches les plus élevées de l’administration romaine. Le peuple statuait quelquefois par des lois sur les mesures à prendre pour l’établissement ou la réparation des routes. Au lieu d’être abandonnées aux soins incertains de ceux dont elles traversaient ou bornaient les terres, les routes furent confiées à de hauts magistrats. La loi des Douze-Tables avait placé dans les attributions des censeurs l’inspection des voies et des eaux de la ville ; c’étaient eux qui adjugeaient les ouvrages à faire, et voilà comment ils furent amenés à ordonner aussi dans le principe l’établissement des routes qui servaient de prolongement à diverses rues de Rome. Les édiles veillaient à l’exécution des travaux. Au commencement du VIe siècle de la fondation, on institua quatre magistrats spéciaux (quatuorviri viarum curandarum) en vue de la police et de l’entretien des rues, et, un peu plus tard, deux autres magistrats à qui étaient dévolus les mêmes soins pour les voies extra-muros (duumviri viis