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m’en méfierais, s’il n’y avait jamais rien à reprendre sous le rapport de la conduite de l’idée comme du maniement de l’expression.

Telle pièce m’aura été communiquée par une collection particulière, par un historien illustre, par quelque grand personnage, par un curieux et connaisseur étranger; j’en reporterai naturellement l’honneur à qui de droit. En bien! l’on s’écriera que rien ne prouve que le possesseur n’ait pas été trompé. Comme si j’eusse dû manifester ma gratitude en faisant sur cette possession une ridicule et injurieuse enquête! comme si les cabinets n’étaient pavés que d’ignorance et de duperie! Je dis où sont les pièces; libre à vous d’aller les contrôler de visu; mais on aime mieux prononcer de haut que d’aller voir : c’est quelquefois si embarrassant que d’avoir vu! Je conteste, on dit que j’élude; j’attaque de front une objection, on dit que je glisse à côté, que je réponds à la question par la question. En vérité, tout cela est-il bien sérieux? Qui ne sait d’ailleurs que l’agression est autrement facile que la défense? L’attaque, pour peu qu’elle soit spécieuse et piquante, la malice publique s’en amuse. La défense, qui est forcée d’être longue pour dérouler par le menu l’écheveau des détails, fatigue, est niée, ou la plupart du temps n’est pas lue.

Un critique bienveillant avait exprimé le regret que je me fusse borné à désigner, d’une manière générale, au début de mon premier volume, les sources où j’avais puisé mes lettres, et que je n’en eusse pas indiqué l’origine au bas de chacune d’elles. J’en étais alors au milieu de l’impression du tome second; je commençai, dès ce moment, à donner ces renseignemens, et dans la préface du troisième volume je fis connaître qu’en un second tirage des deux premiers j’avais partout satisfait à cette juste exigence. Il est bizarre, mais il est vrai qu’en sa réplique M. de Sybel a eu le courage d’écrire que ce second tirage, « s’il existe réellement, n’a pas été livré à la circulation, et qu’après d’assez longues recherches son libraire lui a répondu qu’un exemplaire en était introuvable. » Introuvable! quand deux mille exemplaires venaient d’en être tirés et livrés au commerce, quand il n’en restait plus d’autres chez mon éditeur, à qui la question n’avait pas été faite, bien qu’il fût le premier à qui l’on eût dû s’adresser. Le plus curieux c’est que M. Geffroy, si fort au courant des coutumes de la librairie parisienne, s’est fait, à cette occasion, l’écho du docteur prussien, et qu’il a pris ensuite la peine d’argumenter sur des différences entre le tirage primitif et le nouveau, qu’apparemment il avait réussi à découvrir dans les raretés de deux mille exemplaires ajoutés aux trois mille du premier tirage épuisé.