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de Richelieu, de Louis XIV, de Louis XV, de Louis XVIII et du baron Gérard, ait eu un secrétaire de la main; soit, et après? qu’est-ce que vous en concluez? Que les prétendus autographes des premières années, de 1770 à 1774, sont de ce secrétaire de la main? Oui; vous le dites en toutes lettres une page plus bas. Qu’est-ce à dire? Le secrétaire de la main aurait imité et reproduit en 1770 l’écriture que la reine devait avoir plusieurs années après! O prodige!

Il peut sembler maintenant superflu de revenir sur les défauts de concordance, les contradictions, les impossibilités, dont fourmillent les prétendues lettres à Marie-Thérèse et aux sœurs. Voyons toutefois par quelle sorte de procédé M. Feuillet triomphe de cette série d’objections. Sa réponse en offre un intéressant exemple à propos de la fameuse lettre sur Mme Du Barry. On avait dit à M. Feuillet comme à M. d’Hunolstein : Votre lettre est fausse par plusieurs raisons, notamment parce qu’elle fait dire à Marie-Antoinette : « Quant à la Du Barry, dont je ne vous ai jamais parlé, » alors que, depuis dix-huit mois, la correspondance roule constamment et avec une remarquable insistance sur la Du Barry. M. Feuillet reconnut tout d’abord que ce texte ne pouvait soutenir l’examen, et il répondit que sa transcription était erronée : sa minute autographe donnait, à y regarder de près, reparlé. À cette seconde lecture il en ajouta peu de temps après une troisième (page 37 de l’introduction du 3e volume) : « Je ne vous ai pas encore parlé. » Voici maintenant que M. Feuillet nous donne une quatrième lecture : « Je ne vous ai jamais assez reparlé. » Cependant, tandis que la minute autographe de M. Feuillet se transfigure, l’original autographe de M. d’Hunolstein ne bouge pas, lui, et porte aujourd’hui comme hier ce texte primitif: « La Du Barry, dont je ne vous ai jamais parlé. » Après avoir découvert sa quatrième lecture, M. Feuillet s’écrie avec un air de défi : « Discutez donc maintenant! » Non, certes! M. Feuillet peut défier tout à son aise; son terrain est par trop mouvant : nous ne l’y suivrons pas.

Autre exemple. Comment renverse-t-il l’objection tirée de la mauvaise signature Marie-Antoinette au lieu d’Antoinette au bas des lettres de famille? Il oppose d’abord un fac-simile de la lettre à Marie-Thérèse, 14 juin 1777, inséré dans son troisième volume et signé en effet des deux noms. Malheureusement M. d’Arneth a déclaré apocryphe la pièce que ce fac-simile reproduit, et M. Feuillet n’a pas fait la preuve. Le texte de la lettre est parfaitement authentique : on la trouve aux archives de Vienne, en copie et sans signature, dans un cahier contenant une partie de la correspondance de la reine avec Mercy; mais l’original, d’où l’a-t-on obtenu? M. Feuillet a pu être trompé ici comme ailleurs. Mêmes observa-