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comme n’ayant pas touché le sol français, doit déposer ces marchandises dans un local séparé, facile à surveiller, et ne formant qu’un seul corps. Ces conditions n’étaient pas remplies à Marseille : le dock y a pourvu. Les marchandises soumises à l’entrepôt de douane doivent lui être apportées, il en tire bénéfice, mais c’est là un service public plutôt qu’un privilège. En tout cas, comme lieu d’entrepôt libre, c’est-à-dire de dépôt de marchandises destinées à rester en France, le commerce peut à son gré user ou non du dock. On doit cependant reconnaître que la société des docks a su rendre la concurrence difficile par la situation privilégiée qu’elle s’est faite. Rattaché au chemin de fer de la Méditerranée par un embranchement spécial, propriétaire en totalité ou en partie des bassins creusés à la suite du port de la Joliette, concessionnaire des bassins de radoub et de carénage qui se fondent, le dock est maître du présent et en quelque sorte de l’avenir. Si les ports se développaient à la suite du Bassin-Impérial, le commerce aurait en effet pour aller chercher sur les futurs bassins des entrepôts concurrens, ou pour y prendre les marchandises, un tel chemin à faire et de telles dépenses de transport à supporter, qu’il ne pourrait lutter à armes égales avec le dock qui a pris les premières places. Dira-t-on que de l’autre côté du vieux port la concurrence sera facile? Le jour viendra en effet où le port des Catalans, dont il était déjà question dans le projet de 1844, donnera à la partie sud de Marseille des avantages maritimes encore plus immédiats que le port de la joliette lui-même à la partie nord; mais les Catalans se trouveraient bien éloignés du chemin de fer. Il est vrai que la compagnie de la Méditerranée s’est engagée à construire à la place Castellane une seconde gare d’un accès plus facile pour le port futur des Catalans, et à ouvrir, sur la ligne d’Aubagne à Toulon, un embranchement qui se raccordera avec la ligne principale. Au jour où ce projet se réalisera, il est plus que probable que la société des docks utilisera pour maintenir sa position les terrains qu’elle a prudemment achetés de ce côté de la ville. En tout cas, le commerce trouvera des gens empressés à satisfaire à ses besoins; mais ce sont là des prévisions à long terme. Aujourd’hui le dock suffit à tout, on peut croire qu’il se conciliera de plus en plus les intérêts un moment divergens, et qu’il contribuera pour une large part aux progrès de la prospérité que les ports assurent à notre métropole maritime de la Méditerranée. Le temps marche si vite à Marseille, les vingt années qui viennent de s’écouler ont réalisé de telles merveilles, qu’il n’était pas hors de propos de prévoir pour une nouvelle période des résultats encore plus importans. Aussi est-ce une grande sécurité de savoir à l’avance que tout est prêt pour cet avenir, et