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prudent des fenêtres du rez-de-chaussée, et qu’on avait cru combattre, voilà quinze ou vingt ans, au moyen d’ancres et de chaînes, faisait évidemment de sensibles progrès. L’étaiement devenu nécessaire, la sûreté publique compromise, il fallait bien réédifier. Quant au pavillon de Flore, depuis longtemps aussi on le disait malade, et ce bruit semblait confirmé par des lézardes apparentes qu’on ne réparait pas, sans pourtant aller jusqu’à prétendre qu’une masse aussi épaisse fût prête à s’écrouler et menaçât personne d’un sérieux péril. À plus forte raison n’était-il nullement nécessaire de toucher à toutes les travées de la grande galerie qui n’avaient ni perdu leur aplomb, ni donné le moindre sujet d’alarme. Les immenses travaux maintenant commencés auraient donc pris les proportions les plus modestes, s’il n’eût été question que de reconstructions urgentes. Portés un peu plus tôt au corps législatif, examinés et discutés avec un soin plus minutieux, les crédits demandés se seraient assurément réduits aux sommes nécessaires pour démonter pierre par pierre les travées vraiment endommagées, créer un nouveau sol et remonter les pierres telles qu’elles étaient, sans addition ni changement. C’était l’affaire d’une campagne et d’un million peut-être, tout au plus.

D’où vient donc cette vaste entreprise qui se poursuit en ce moment, et dont les progrès ultérieurs sont dès à présent annoncés par les amorces les plus visibles et les moins déguisées ? Ce n’est évidemment pas la reprise en sous-œuvre de ces pierres délabrées qui a produit de telles conséquences : elle en est l’occasion, pour ne pas dire le prétexte ; la véritable cause c’est d’abord, comme nous l’avons dit, la surélévation du nouveau Louvre, le besoin de corriger la disparate survenue entre les deux palais, puis un autre désir tout naturel et tout pratique, l’envie de rendre les Tuileries plus commodes et plus habitables, de leur donner plus de surface, d’en augmenter les logemens. Ce sont ces deux motifs qui, s’unissant et se prêtant main-forte, ont mis au monde le projet en cours d’exécution. Voilà pourquoi le parti le plus simple, le plus sûr, le moins dispendieux, la dépose et la repose des travées en souffrance, n’a pas pu triompher. On a voulu que la reconstruction ne fût pas seulement partielle, qu’elle fût totale, afin d’avoir le droit de lui donner un autre style et plus d’élévation ; puis, ce point décidé, on s’est dit : Profitons du surcroît de hauteur, mettons-nous plus à l’aise, élargissons la construction. Et c’est ainsi que sur un travail de pure restauration et de peu d’importance on a greffé une œuvre colossale dont on n’aurait jamais abordé la pensée directement, de prime abord.

On nous dira peut-être qu’autant valait bien faire du moment qu’on se mettait en train, que déposer et reposer purement et sim-