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faibles ont disparu, les banques solides se sont fortifiées, et leur utile influence ne cessera point de s’exercer. Si nous résistons au mirage de la liberté d’émission, fonction tout à fait secondaire et fonction distincte du véritable office de banque, si nous avons toujours maintenu le principe que le billet faisant office de monnaie réclamait, comme celle-ci, l’unité et la stabilité, et devait appeler l’action de l’état, dont le premier devoir était de veiller à la fidélité et à la sécurité de la monnaie fiduciaire comme de la monnaie métallique, au même titre qu’il est appelé à veiller à la rectitude des poids et mesures, nous sommes aussi le partisan décidé de la liberté des banques sainement entendue, sans mélange d’aucune fiction et d’aucun artifice. Un grand enseignement sort de la crise financière de l’Angleterre : c’est grâce à la solidité de la circulation garantie par l’act de 1844 que les désastres privés n’ont point dégénéré en un désastre public. D’un autre côté, si certains établissemens ont sombré, la grande et féconde institution des banques de dépôt, cet actif intermédiaire entre le capital qui s’offre et la demande qui se présente pour l’employer, n’a fait que se retremper durant l’épreuve. Les saturnales d’une spéculation éhontée ont pu dissiper des capitaux nombreux ; elles n’ont pas porté atteinte au principe du bien-être général. Les banques de dépôt, appuyées sur la base inébranlable de la circulation, garanties par la Banque d’Angleterre, forment le plus puissant levier de l’activité productive. Ce que nous pouvons faire de mieux en France, c’est d’en bleu étudier le mécanisme et de nous l’approprier complètement.

Le chiffre des dépôts que possédaient en 1865 les institutions de crédit de Londres dépassait 100 millions de livres (2 milliards 500 millions de francs). La London and Westminster bank recueillait à elle seule près d’un demi-milliard de ressources actives. En réunissant ce résultat à celui obtenu par trois autres grandes banques, la London Joint-Stock, l’Union Bank of London et la London and County, on arrivait à un total de 70 millions sterling (1 milliard 750 millions de francs)[1]. On ne saurait relever d’une manière précise le chiffre des dépôts pour tout le royaume-uni, mais les renseignemens que nous avons recueillis nous le font évaluer au minimum de 2Î0 ou 300 millions de livres sterl. (6 ou 7 milliards 1/2 de francs). On l’a estimé jusqu’à 400 millions sterling (10 milliards de francs). Ces données colossales suffisent pour imprimer la conviction que là se rencontre l’avenir du crédit et non dans l’accroissement périlleux d’une monnaie fiduciaire sans garantie métallique. Les plans les plus avantageux se bornent à promettre de ce côté quelques centaines de millions de francs, et nous savons

  1. Le chiffre de ces dépôts a encore augmenté en 1866.