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Mais c’est là une conception tout à fait théorique. Si, comme il est probable, le flux électrique n’a lieu qu’au sein de la matière pondérable, il en agite nécessairement les molécules ; c’est dire qu’il n’y a pas d’électricité sans chaleur. On doit même remarquer à cet égard que les différentes substances offrent à peu près le même ordre de conductibilité par rapport à l’électricité et par rapport à la chaleur. Si, par exemple, on considère les métaux à ce double point de vue, non-seulement ils se rangent dans les deux cas suivant le même ordre (argent, cuivre, or, étain, fer, plomb, platine, bismuth), mais une même série de nombres peut représenter assez exactement leur double conductibilité. Le connexion étroite qui lie ainsi les phénomènes calorifiques et électriques ne permet guère d’espérer que les actes mécaniques de l’électricité puissent être isolés dans la pratique et atteints par l’observation directe.

A mesure que nous avons examiné les particularités diverses qui signalent la propagation des courans, l’origine des forces électromotrices, la distribution du travail dans les conducteurs, nous nous sommes affermi dans cette idée, que l’électricité consiste en un transport du fluide éthéré, de ce même fluide qui produit la lumière. Voilà un rapprochement qui pour beaucoup d’esprits sera sans doute inopiné. On n’a guère songé jusqu’ici à comparer la lumière et l’électricité, et pourtant nous en venons à regarder l’une et l’autre comme des mouvemens divers d’un même fluide. Une liaison nouvelle apparaît entre ces deux modes de mouvement.

Si nous considérons la généralité des corps que nous offre la nature, nous pourrons remarquer que les corps diaphanes sont d’ordinaire isolans ; perméables à la lumière, ils ne laissent pas passer l’électricité. Au contraire les corps conducteurs sont d’ordinaire opaques, témoin tous les métaux. On objectera peut-être que l’eau est à la fois diaphane et conductrice, la gutta-percha à la fois opaque et isolante ; mais ne parlons que des cas extrêmes, négligeons les intermédiaires. Nous voyons se dessiner deux groupes très nets, les corps diaphanes, les corps conducteurs ; ces désignations sont mal choisies, puisqu’elles ne se font pas opposition, mais sous les mots voyons les faits : dans les corps de la première classe, l’éther ne peut se mouvoir que transversalement, il ne peut prendre au contraire qu’un mouvement longitudinal dans les corps de la seconde catégorie. La différence d’agrégation moléculaire crée ainsi pour l’éther une différence de mobilité. Voilà tout ce que nous pouvons dire ; mais nous pouvons affirmer que les deux classes de corps renferment un même éther diversement mobile et non point deux fluides différens. Si l’on voulait admettre l’existence d’un fluide lumineux propre aux corps diaphanes et d’un fluide électrique propre