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ces bonnes voitures jaunes, formées d’un coupé-cabriolet et d’une rotonde; une large bâche de cuir retenait les paquets des quatre ou cinq voyageurs qu’elles pouvaient contenir; quatre chevaux montés par deux postillons les entraînaient à travers la poussière qu’elles soulevaient sur les routes. Elles ont duré en France jusqu’en 1839 et 1840. A cette époque, M. Conte, qui était un administrateur fort intelligent, alla lui-même en Angleterre étudier le coach-mall, qui avait succédé depuis longtemps aux pataches de Palmer, et la France fut dotée de ces excellentes berlines de poste, de ces briskas rapides et commodes qui firent jadis notre admiration, qui devaient voyager avec une vitesse moyenne de 16 kilomètres à l’heure, et qui n’ont disparu que devant les wagons des chemins de fer.

Cependant les postes n’étaient point florissantes tant que dura l’ardente période de la révolution : les maîtres de poste, aux trois quarts ruinés, donnèrent leur démission; mais la terrible assemblée ne plaisantait pas avec les services publics, et un décret du 8 octobre 1793 força les démissionnaires à reprendre leurs fonctions. Il y allait de la tête, ou peu s’en faut; ils n’hésitèrent pas et se soumirent. Par décret du 18 octobre 1794, la convention, fidèle à ses principes, abolit le privilège des messageries et accorda une liberté illimitée à l’industrie des transports. Sans aucun doute c’était nuire à l’administration des postes; mais, en les délivrant de leur service le plus encombrant, c’était les mettre à même de pouvoir suffire plus tard à l’extraordinaire accroissement des correspondances, et c’était, œuvre bien plus importante, augmenter par la concurrence des initiatives individuelles les moyens de transport et de communication dans une proportion considérable. Le service des postes allait mal, la convention n’en pouvait douter, et elle crut remédier à tous les inconvéniens qu’elle connaissait en portant à douze le nombre des administrateurs (août 1795). Ai-je besoin de dire que cette mesure ne fut d’aucune utilité? Tout ceci n’était que provisoire, et les tâtonnemens n’étaient point finis. Le directoire, assez bien inspiré cette fois, remet les postes sous la direction d’un commissaire-général et lui rend les messageries, qu’il ne tarde pas à restituer à l’industrie particulière, à la charge par elle de verser un dixième de ses bénéfices au trésor public (loi du 9 vendémiaire an VI). Le premier commissaire-général aux postes fut Gaudin, dont l’empire fit un duc de Gaëte. Bonaparte, par un arrêté consulaire du 4 janvier 1800, fonda l’organisation encore actuellement en vigueur; M. de la Valette, nommé commissaire-général en 1801, prend dès 1804 le titre de directeur-général, titre qui, après avoir été modifié en 1830 (président du conseil des postes) et en 1831 (directeur d’administration), redevient en 1844 et reste encore aujourd’hui la dénomination officielle.