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lions, et les autres pays ensemble encore 14 millions, ce qui donne un total de 172 millions de tonnes. Le combustible fossile remplace dans une large mesure le bois, devenu de plus en plus rare et plus cher; aujourd’hui l’Europe entière, si elle était couverte de forêts, fournirait à peine, en bois taillis et en charbon de bois, l’équivalent de la houille consommée dans une année. Où cette dévastation des dépôts carbonifères nous mènera-t-elle?

Les gisemens connus seront probablement épuisés au bout de cinq ou six cents ans, et, si nous en croyons sir William Armstrong, les mines de l’Angleterre ne dureront même plus deux siècles, si l’exploitation dont elles sont l’objet continue de suivre son cours. Cette question de la fin des houillères préoccupe fort les économistes. On commence à priser les qualités de houille inférieures, que l’on dédaignait encore il y a vingt ans; on songe à restreindre le combustible, à approfondir les mines; mais tout cela ne peut que retarder un peu le jour de la disette générale. Que faire ensuite? Le bois et le pétrole offrent des ressources bien insuffisantes. Faudra-t-il songer à décomposer les roches qui renferment des carbonates, afin d’en extraire le combustible par excellence? M. Simonin propose une solution originale : il faut, dit-il, mettre le soleil en bouteilles. La radiation solaire a formé les plantes, et par conséquent le charbon fossile; demandons-lui directement la chaleur qu’elle nous apporte en si larges quantités. Qui nous empêche par exemple de chauffer des boules d’argile par le moyen des miroirs réflecteurs et d’emmagasiner ainsi la chaleur, comme on met le froid en cave dans les glacières? Nous concédons à M. Simonin que la chaleur que nous envoie le soleil est immense, car il résulte des expériences de M. Pouillet que la terre reçoit annuellement de cet astre environ un septillion de calories; l’atmosphère en absorbe à peu près la moitié, le reste pénètre jusqu’au sol et équivaut à la chaleur de combustion de 60 à 80 trillions de tonnes de charbon : c’est trois ou quatre cent mille fois plus que n’en produisent les houillères; mais le moyen de fixer cette chaleur, disséminée sur une surface de 50 milliards d’hectares? Il nous semble que la question est ailleurs. Au lieu de demander, comme par le passé, le travail mécanique à la chaleur des foyers qui alimentent les machines, on finira par le demander à quelque autre force naturelle. L’électricité donne peu d’espoir de nous remplacer la vapeur; mais il y a bien d’autres forces que l’homme n’a pas encore domestiquées : pour n’en citer qu’une, les marées de l’océan attendent encore leur Watt et leur Fulton.

Nous avons encore à signaler la publication du second volume des Biographies de savans célèbres, par M. Louis Figuier. Avec le Tableau de la nature, les Merveilles de la science, et l’Année scientifique, cela fait quatre volumes, ou bien la valeur d’environ deux mille pages, que M. Figuier offrira désormais au public à chaque nouvelle année, — à moins que la progression dont il nous donne depuis longtemps le spectacle ne soit pas