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de fer. La moraine terminale de l’ancien glacier de la Dora-Riparia forme un arc de cercle entre Rivoli et Pianezza. Près de ce village se trouve un espace appelé regione alle pirtre à cause du grand nombre de blocs erratiques dont il est semé, et au milieu même du bourg se dresse un rocher de serpentine appelé il Rocco. C’est un des plus grands blocs erratiques connus : il a 25 mètres de long sur 14 mètres de large et 12 mètres de haut ; au sommet se trouve une chapelle qui est loin d’en couvrir toute la superficie. On conçoit qu’en le voyant un géologue piémontais l’ait considéré comme une roche en place ; pour le convaincre du contraire, M. Gastaldi a dû fouiller les caves et sonder les puits des maisons voisines. les uns et les autres étaient creusés dans des terrains meubles ; en haut le terrain glaciaire, au-dessous les cailloux roulés du diluvium. Près du petit lac d’Avigliana, on voit des roches serpentineuses polies et striées qui portent encore les blocs qui les ont usées.

La Dora-Baltea, qui se jette dans le Pô près de Chivasso ; prend sa source dans les glaciers du revers méridional du Mont-Blanc ; ses affluens sortent des vallées qui aboutissent au Mont-Rose ou qui s’enfoncent dans le massif des montagnes de Cogne. Le glacier qui descendait par la vallée d’Aoste provenait donc de ces trois massifs : c’est le pendant du glacier du Rhône ; mais au lieu d’arriver comme celui-ci dans une grande vallée où d’autres glaciers, tels que ceux de l’Isère, de l’Arve, de l’Aarç etc., descendaient avec lui, au lieu d’être arrêté dans sa marche par un barrage tel que la chaîne du Jura, le glacier de la vallée d’Aoste, débouchant à Ivrée dans les plaines du Piémont, s’est étalé librement sur un sol nivelé par les eaux. Aussi, au lieu de la forme irrégulière et tourmentée du glacier du Rhône, forcé de se rejeter à gauche vers Genève, à droite vers Soleure, le glacier de la vallée d’Aoste forme-t-il un magnifique amphithéâtre dont le grand diamètre est marqué à ses deux extrémités par les villes d’Ivrée et de Caluso. Sa moraine latérale gauche appelée la Serra, s’adossant aux Alpes, où elle porte le village d’Andrate, s’élève à 650 mètres au-dessus de la Doire ; elle descend en se divisant jusqu’à Cavaglia, près du lac de Viverone. C’est incontestablement l’ancienne moraine latérale, formée uniquement par l’accumulation de blocs erratiques et de fragmens, la plus élevée, la plus régulière et la mieux caractérisée des Alpes. La moraine latérale droite, moins régulière, s’étend de Brosso jusqu’au lac de Candia près de Caluso. Enfin la moraine terminale décrit un arc de cercle entre les deux lacs. La Doire traverse l’amphithéâtre morainique en suivant son grand axe. Les collines serpentineuses voisines d’Ivrée sont entièrement polies et striées. Partout sur la moraine frontale on recueille des cailloux rayés de