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Gueldre et le duc de Bouillon, vaincus ou dépouillés dans la dernière guerre.

Il est vrai qu’il conservait à la France le duché de Bourgogne, le comté d’Auxerre, le comté de Mâcon, la vicomte d’Auxonne, que le traité de Madrid le forçait à donner comme prix de sa liberté. Il devait aussi y tenir à jamais réunies les provinces du centre qu’il avait confisquées sur le duc de Bourbon, dont il s’était engagé à casser la condamnation et à restituer l’héritage, ce qu’il ne fit point. Il ne rendit pas davantage la principauté d’Orange, enlevée à Philibert de Châlons, lieutenant-général de Charles-Quint en Italie et tué devant Florence une année après.

Au lieu de la Bourgogne et de ses vastes dépendances, il devait remettre pour la délivrance de ses enfans les 2 millions d’écus d’or qu’il avait toujours offerts et selon le mode de paiement qu’il avait toujours proposé[1]. Il n’avait plus à fournir des troupes qui fissent cortège à son heureux rival en Italie, et les 100,000 écus d’or que le traité de Madrid l’obligeait à payer pour le voyage triomphal de l’empereur en Italie, l’empereur les ajoutait à la dot de sa sœur la reine Éléonore, dont le mariage, déjà convenu et à moitié célébré en 1526, semblait destiné à assurer en 1530 son union avec François Ier[2].


IX.

Au moment où se concluait la paix de Cambrai Charles-Quint naviguait vers l’Italie. Parti de Palamos dans les derniers jours de juillet, il débarquait à Gênes le 12 août. Tandis qu’il descendait sur la côte de la Ligurie avec les troupes qu’il avait amenées d’Espagne, le comte Félix de Werdenberg arrivait par le Tyrol avec huit mille lansquenets et douze cents chevaux, le prince d’Orange remontait vers le centre de la péninsule à la tête de l’armée victorieuse de Naples, et Antonio de Leyva, dont les forces s’étaient accrues dans le Milanais, y tenait la campagne sans y rencontrer un ennemi. Paraissant en vainqueur armé dans le pays que François Ier laissait à sa discrétion, s’y comporterait-il en dominateur avide? Comment y exécuterait-il le traité de Cambrai, qu’il apprit à Gênes et qu’il ratifia à Plaisance? — Ce traité changea tous ses desseins,

  1. 1,200,000 écus comptans lorsque le dauphin et le duc d’Orléans lui seraient rendus, 290,000 représentés par les sommes que l’empereur devait au roi d’Angleterre et dont le roi d’Angleterre remettait les obligations au roi de France, enfin les 510,000 restant garantis par les biens territoriaux que le duc de Vendôme et plusieurs seigneurs français possédaient dans les Pays-Bas.
  2. Voyez le traité de Cambrai dans Dumont, Corps diplomatique, vol. IV, 2e partie, p. 7 à 15.