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ne comparurent pas ; mais leurs propositions y furent examinées et censurées. « Ces hommes ont déjà comparu devant la haute-cour, s’écria un des assistans, et la haute-cour les a absous, » — « Si tel est l’arrêt, répliqua une voix, c’est l’arrêt qu’il nous faut juger ici. » Comme on devait s’y attendre, livres, auteurs et cour suprême, tout fut condamné. « Jusqu’à ce jour, écrivait le primat de Cantorbéry dans une lettre pastorale, la couronne s’est arrogé le droit d’interpréter, la doctrine religieuse ; la couronne est aujourd’hui hérétique : que l’église se sépare donc de la couronne[1] ! » Importantes et solennelles déclarations ! Ainsi l’église d’Angleterre, cette œuvre savante et laborieuse de Henri VIII, d’Elisabeth et des Stuarts, repoussait la royauté, sa tutrice, et, comme tant d’autres, demandait à devenir libre dans un état libre.


V

Les anglo-catholiques et les membres de la haute-église ne forment donc plus à présent qu’un seul troupeau. Même désir d’entraver les progrès du rationalisme, même aspiration à l’indépendance politique, même répulsion contre Rome, la commune ennemie. Les tractariens ne peuvent pardonner la bulle papale de 1850 et l’audacieux envahissement tenté derrière eux et contre eux ; volontiers, de leur côté, les membres de l’établissement reconstitué, en high-church admettent la théologie nouvelle et s’inclinent devant les principes de l’église, tous enfin, à l’exemple des divines du XVIIe siècle, adoptent la formule : l’église d’Angleterre, portion indivise de l’unité catholique. Malheureusement, il faut le dire, une déplorable tendance à l’intolérance religieuse se fait voir au fond de cette commune pensée, et contribue aujourd’hui à refroidir bien des sympathies.

Les résultats de cette union intime de l’anglo-catholicisme et de la haute-église se sont montrés clairement dans le dernier ouvrage du docteur Pusey. Essentiellement catholique dans ses principes et ses doctrines, l’Eiremcon de l’éminent auteur demande à l’église romaine si une réunion dans la limite de la foi professée par les grands docteurs des premiers âges ne vaut pas mieux que le schisme perpétuel[2]. Il invoque les grands souvenirs du XVIIe siècle et l’alliance rêvée jadis entre l’archevêque Wake et la faculté de théologie de Paris ; mais en même temps il refuse de reconnaître, comme dogme catholique l’infaillibilité de l’évêque de Rome, et n’admet

  1. The Guardian ; The Church Times (1863-1865).
  2. The Guardian ; The Church Times (1863-1865).