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deux choses dont.il faut que Lyon, si invulnérable qu’il se croie, ; tienne compte tôt ou tard. La première, c’est qu’en Suisse, en Allemagne, en Angleterre, les procédés mécaniques occupent une place de plus en plus grande dans la fabrication des tissus de soie, et que le débouché de ces états se développe au préjudice des ateliers de la Loire et du Rhône. L’exposition en dit beaucoup là-dessus à qui sait observer. La seconde chose dont Lyon aura tôt ou tard à tenir compte, ce sont les crises périodiques auxquelles la fabrique est sujette, et qui découlent évidemment d’un vice de constitution. Au moment où l’on s’y attend le moins, Lyon crie à l’aide, et il faut alors que l’assistance officielle s’en mêle soit avec une caisse de prêts, comme en 1832, soit avec un don sous prétexte de sociétés coopératives comme en 1866. Il n’y a rien là de régulier, ni au fond de bien efficace ; un malaise indélébile, une émigration persistante en sont les témoignages. Lyon se dépeuple au profit des villages environnans, où la vie est moins chère ; c’est la soierie plutôt que l’ouvrier qui se déplace. L’air des villes qu’obère un octroi ne peut plus lui convenir ; elle a même poussé des reconnaissances bien au-delà des communes de la banlieue lyonnaise, dans l’Isère, dans l’Ain, dans la Loire et la Haute-Loire, partout où des chutes d’eau offraient à l’industrie des forces à bon marché. Dans ce dernier cas, le travail porte sur les articles qui reçoivent la teinture après le tissage, comme les crêpes ou les foulards, et sur ceux qui, fabriqués en soie teinte, ont à subir un apprêt, comme les satins. La force des choses a amené ce double déplacement, et c’est un indice de ce qu’il faut faire de parti pris, résolument, avec un esprit de suite : il faut, comme on l’a conseillé, ouvrir à l’exécution mécanique un accès plus large, ne conserver les vieux cadres que pour les articles de choix, les briser pour les articles de débit courant et s’en remettre ensuite à l’étoile de Lyon, qui n’a jamais eu que de courtes éclipses.


En retraçant rapidement ce que la chimie, la physique et la mécanique ont introduit dans l’industrie d’élémens nouveaux, nous avons plané sur l’exposition ; il resterait à entrer dans le détail des produits et à en comparer les mérites. Est-ce bien le moment, et le jugement ne passerait-il pas pour prématuré ? Le jury qui doit prononcer en dernier ressort a une lourde tâche et une grave responsabilité ; convient-il d’y ajouter, comme complication, le tumulte des opinions extérieures ? Mieux vaut ajourner cet examen et s’en tenir pour cette fois à quelques réflexions rapides.

Il y a dix ans à peu près, une certaine émotion se répandit en France au sujet des écoles de dessin que multipliait la