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tertiaire qui va mourir en pente insensible sous les eaux de la Mer du Nord et de la Baltique, de façon à n’y pas ouvrir de ports d’une profondeur suffisante pour la marine de guerre, sauf Kiel ; elle se relève ensuite peu à peu vers le sud, où elle est bornée par les massifs de roches cristallines des monts Sudètes, par la chaîne des Géans, du Harz, du Teutoburger-Wald et de l’Eifel avec ses coulées de lave et ses cratères éteints. La superficie est composée d’un mélange d’argile et de sable, dépôts opérés au fond de la mer et soulevés au-dessus du niveau des eaux pendant l’époque géologique la plus récente. Dans le sous-sol, on rencontre tantôt une croûte ferrugineuse, bien connue dans les landes, et qui fait le désespoir du cultivateur, tantôt de la marne de formation éocène, qui permet d’amender la terre en loi donnant les élémens calcaires qui lui font généralement défaut. La craie même apparaît parfois au jour comme dans l’île de Rugen, où elle se dresse du côté de la mer en falaises de plusieurs centaines de pieds de hauteur. Parcourons rapidement les différentes provinces.

La plus orientale et la plus grande, la Prusse, confine à la Russie, dont elle reproduit assez exactement les caractères physiques. Le bassin et le delta de la Vistule aux environs de Dantzig, le delta du Memel à partir de Tilsitt, le district de Marienwerder, offrent des terres d’excellente qualité produisant du froment, du lin, de l’orge en abondance ; mais presque tout le reste de la province est peu fertile, entrecoupé de marais, de petits lacs et de bruyères absolument stériles, où le résineux même, le plus sobre des arbres, refuse de pousser. Sous le 54e degré de latitude nord, le climat est sévère, et la période de végétation très courte. La récolte se fait tard, les semailles d’automne très tôt ; il faut ainsi exécuter tous les travaux agricoles en peu de temps et employer beaucoup de chevaux et d’hommes, qu’on ne peut utiliser pendant le long hiver qui suit un rapide et brûlant été. Cette circonstance augmente les frais de production. D’autre part, le prix des denrées reste relativement assez bas, parce que la population est clair-semée et les voies de communication encore peu nombreuses. La conséquence naturelle de cet état de choses est que le produit net et le prix des terres ne sont pas considérables. Les chiffres suivans donneront une idée de ces conditions économiques. La population s’élève seulement à 2,559 habitans par mille carré, tandis que la moyenne pour tout le royaume est de 3,771. Le prix de la viande de bœuf est de 60 à 80 centimes par kilo. On ne compte par mille carré que 4,125 mètres de routes et de canaux, et les estimations officielles du cadastre, faites il y a quelques années, n’attribuent à la terre arable qu’un produit net de 12 fr. 50 par hectare et une valeur vénale de 375 francs.