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M. DE CAMORS

seconde partie[1].

IV.

Le domaine de Reuilly se composait de deux fermes perdues au milieu des champs, et d’une maison de quelque apparence qui avait été habitée autrefois par la famille maternelle de M. de Gamors. Il n’avait, quant à lui, jamais vu cette propriété. Il y arriva à la fin d’une belle journée d’été, vers huit heures. Une longue et sombre avenue de vieux ormes qui entre-croisaient leurs cimes épaisses conduisait à la maison d’habitation, qui ne répondait pas à cette préface imposante. C’était une maigre construction du siècle dernier, simplement ornée d’une attique et d’un œil-de-bœuf, mais flanquée toutefois du colombier seigneurial. Elle empruntait d’ailleurs un certain air de dignité aux deux petites terrasses superposées qui la précédaient, et dont les doubles escaliers s’appuyaient sur des balustrades de granit. Deux animaux en pierre, qui avaient peut-être ressemblé autrefois à des lions, se faisaient pendans de chaque côté de la balustrade, à l’entrée de la terrasse supérieure, et se dévoraient de l’œil depuis cent cinquante ans.

Derrière la maison était le jardin, au milieu duquel on remarquait sur un socle en maçonnerie un cadran solaire mélancolique, entre quelques plates-bandes figurant des as de cœur et aussi des as de trèfle ; plus loin, des buis taillés en forme de confessionnaux et d’autres en forme de pions d’échecs ; dans le fond, faisant face à la maison, un mur en hémicycle propre aux espaliers ; à droite,

  1. Voyez la Revue du 15 avril.