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3e corps. A sept heures du matin, il gravissait les premières pentes lorsqu’il était rejoint par le général La Marmora, que la canonnade matinale de Villafranca avait attiré, et qui se chargea lui-même de fixer les positions que la division Brignone devait prendre sans plus de retard. Dans sa préoccupation de ce qui venait d’arriver à Villafranca et de ce qui pouvait se renouveler, n’ayant peut-être aussi que des données assez vagues sur ce qui se passait à la gauche de l’armée, La Marmora n’eut qu’une pensée, faire face à Villafranca. Une partie des forces de Brignone fut donc portée sur Monte-Torre et Monte-Croce, qui dominaient la plaine, mais qui à leur tour étaient dominés par Monte-Godio, la Berettara. La brigade des grenadiers de Lombardie, à la tête de laquelle était le duc d’Aoste, fut laissée sur la route encaissée qui passe entre Custoza et Monte-Torre en se dirigeant vers Staffalo.

Ces dispositions avaient par malheur un double inconvénient qui allait bientôt se faire sentir. En laissant libres les hauteurs de Custoza même, de Belvédère, elles ouvraient un espace par où les Autrichiens pouvaient s’avancer en coupant toute communication avec le reste du 1er corps d’armée, et en même temps elle plaçait la division Brignone sous les feux qui pouvaient la dominer. C’est ce qui ne manquait pas d’arriver. Brignone était à peine en position sur ces deux cimes nues et abruptes de Monte-Croce et de Monte-Torre qu’il se voyait criblé de feux meurtriers partant de divers points. C’était le 9e corps autrichien de Hartung qui se démasquait et entrait en action, appuyé sur Sommacampagna, dessinant ses attaques sur tous les points, sur Monte-Croce, sur la vallée de Staffalo en même temps que sur les hauteurs inoccupées conduisant à Custoza. En peu de temps, les grenadiers de Sardaigne, décimés par le feu à Monte-Croce, se voyaient assaillis à plusieurs reprises par l’ennemi, qu’ils repoussaient sans cesse en s’affaiblissant eux-mêmes, et la situation devenait menaçante. Brignone n’avait pas tardé à voir le danger, et, réparant l’erreur qui avait été commise, il voulut, avec les grenadiers de Lombardie laissés en réserve, s’emparer des hauteurs du Belvédère. Les grenadiers en effet prirent plusieurs fois et reperdirent ces positions. C’est là que le prince Amédée, à la tête de ses soldats, recevait une blessure à la poitrine, et peu après le général Gozzani était à son tour mis hors de combat. Il ne restait plus à la brigade de Lombardie qu’à se replier sur Custoza, dont elle s’emparait cette fois, mais qu’elle perdit encore après un combat acharné. La conséquence pour Brignone était la pénible nécessité de la retraite. Il se replia après un combat de quatre heures où il avait perdu 67 officiers, plus de 600 soldats, — et ici encore on ne touchait qu’à dix heures du matin. Brignone avait quitté le dernier Monte-Croce, où il s’était tenu