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résultats des fouilles opérées sur les bords du Tigre sous l’intelligente et courageuse direction de MM. Botta et Layard, et malgré l’incertitude qui règne encore sur bien des points de l’histoire de ces contrées, les persévérans travaux de MM. G. et H. Rawlinson, Hincks, Oppert, Spiegel, etc., présentent déjà des données assez positives pour qu’on puisse s’en servir dans l’intérêt des études bibliques.

Les inscriptions cunéiforme sont permis d’établir sur un terrain solide plusieurs périodes de l’ancienne histoire de l’Assyrie. On a sans doute eu tort d’en présenter le déchiffrement comme définitif et reposant sur des règles infaillibles : la preuve qu’il n’en est pas encore ainsi, c’est que les hommes les plus compétens sont loin d’être toujours d’accord sur la manière de les lire. Le désir d’y trouver à tout prix des confirmations de la tradition biblique a engendré des interprétations tout au moins très complaisantes. Enfin les interprètes de ces curieux documens ont une foi trop implicite dans ces chroniques monotones où les conquérais asiatiques racontent eux-mêmes leurs exploits avec une vantardise bientôt insupportable. Il n’en est pas moins vrai que ces inscriptions fournissent des renseignemens fort précieux sur une longue période à peu près inconnue jusqu’à ces derniers temps.

Les deux vallées jumelles du Tigre et de l’Euphrate furent le théâtre d’une civilisation primitive qui le cède à peine en antiquité à celle de l’Égypte et présente avec cette dernière plus d’une analogie mystérieuse. Babylone et le cours inférieur de l’Euphrate doivent avoir été le foyer primitif de cette civilisation à laquelle nous devons l’écriture, l’art de construire en briques, et les premières notions astronomiques sérieuses ; mais vers le XIIIe siècle avant notre ère la prépondérance passa de la ville de l’Euphrate à l’une de ses vassales ou de ses colonies, à Ninive, la ville du Tigre. Cette suprématie de Ninive, qui dura plus de six siècles et que Babylone, malgré de fréquentes révoltes, dut habituellement reconnaître, paraît avoir tenu à la supériorité guerrière de la tribu assyrienne proprement dite, qui ne cessa de s’imposer victorieusement à tous ses voisins, jusqu’au moment où les peuples aryens de l’Iran, avec les Mèdes pour avant-garde, entrèrent décidément en ligne.

Tel était l’empire dont le roi de Juda, Achaz, avait réclamé le secours contre les envahisseurs syriens et éphraïmites. Tiglat-Pilezer[1], dont il capta les bonnes grâces en lui payant une somme énorme enlevée au trésor de Jéhovah, ne se fit point prier. Ce n’était pas la première fois que les Israélites, au moins ceux du nord,

  1. Tiglat-pal-zira, qu’on adore Pal-zira, c’est-à-dire le fils du Seigneur (d’Assur ou de Bel), l’un des noms honorifiques de Nin ou Ninus.