Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 70.djvu/721

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ceux qui s’éditent aujourd’hui dans tous les formats, depuis l’in-32 jusqu’à l’in-folio, se vendent à très bon marché. Je pourrais citer tel ouvrage en 24 volumes in-12 dont le prix ne dépasse pas 4 fr. Le papier chinois n’est pas représenté à l’exposition ; il se fait soit avec des chiffons, soit avec divers produits végétaux. On en fabrique de tout genre et de toutes qualités, depuis le papier d’emballage jusqu’au papier à lettre, sans parler du papier de soie qu’emploient le peintre et le dessinateur.

L’écriture idéographique n’a peut-être pas nui aux œuvres de pure imagination, car les romanciers chinois sont ou du moins ont été très féconds. L’exposition possède quelques-uns de leurs ouvrages ; M. Stanislas Julien a traduit, des romans[1], M. Abel de Rémusat et d’autres encore certaines œuvres de la poésie chinoise, qui est nombreuse et variée. En tout ce qui est science exacte ou d’observation, l’ignorance de la nation, y compris les lettrés, est extrême. Il existe bien quelques traités élémentaires d’arithmétique ; mais le système de numération écrite, très compliqué, ne se prête à aucun progrès en algèbre, en trigonométrie, en géométrie, partout enfin où l’emploi de nombres considérables devient nécessaire. Les prétendus savans chinois n’ont nulle connaissance en physique, en chimie, en médecine, en astronomie ; ils admettent les erreurs les plus grossières, les fables les plus extravagantes. Les difficultés de l’écriture sont probablement la cause de cette triste situation intellectuelle. On conçoit quelle dépense de temps et d’études exige la connaissance même imparfaite des signes représentatifs de la pensée : certains dictionnaires en évaluent le nombre à quarante-quatre mille. Outre la difficulté de les interpréter, il est aisé de les altérer ; aussi tout progrès dans les diverses branches de la science parait interdit à la Chine tant qu’elle n’adoptera pas l’usage d’une langue européenne, comme l’ont déjà fait quelques négocians chinois des côtes, ou du moins tant qu’elle n’appliquera pas l’alphabet et l’écriture syllabiques à la traduction de son propre idiome. A cet égard, nos missionnaires ont tracé la voie en adaptant notre alphabet à la langue annamite, dont la construction est analogue à celle de la langue chinoise et japonaise.

Est-ce à la science des anciens missionnaires jésuites, très en faveur au XVIIe siècle auprès de l’empereur Kang-hi, qu’est dû le livre de médecine orné de figures anatomiques, assez confusément dessinées d’ailleurs, dont un exemplaire se voit à l’exposition. Aujourd’hui l’art de guérir ne constitue pas dans ce pays une

  1. Les Deux Cousines entre autres, dont un exemplaire chinois se trouve à l’exposition.