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que ce bronze niellé d’argent dont nous voyons quelques modèles, Sur le métal, l’ouvrier dessine et creuse des fleurs, des oiseaux, d’autres ornemens, et dans les rayures il enfonce au marteau un mince fil d’argent ; le tout est ensuite poncé et repoli. Le Japonais ne se sert du marbre ni pour la sculpture ni pour l’architecture. On ne l’emploie que pour le dallage.

La porcelaine japonaise, égale en réputation et en mérite à la porcelaine de Chine, soutient même la comparaison avec l’admirable exposition de notre manufacture de Sèvres. Il est tel vase craquelé, au fond blanc avec de légers dessins, feuilles ou fleurs, couleur gris clair ou vert d’eau, que nous n’imiterions pas sans peine. On estime en Europe la vieille porcelaine du Japon plus que les porcelaines modernes. Il me semble que les modèles exposés par M. Moussaciya, de Yédo, peuvent défier ceux de ses prédécesseurs. En comparant les produits de l’archipel à ceux du Céleste-Empire, on peut signaler une entente différente de l’ornementation, un goût particulier chez chacun des deux peuples. Tandis que l’un, employant des couleurs plus vives et plus éclatantes, recouvre volontiers ses porcelaines de paysages et de scènes empruntées à la vie de l’homme, l’autre semble s’attacher de préférence à représenter avec des teintes moins tranchées des fleurs ou des ornemens de pure imagination. Chacun connaît déjà ces admirables albums japonais qui représentent en relief sur papier de soie des fleurs, des papillons, des oiseaux. Il est remarquable que les oiseaux, brodés sur la soie ou peints sur la porcelaine, soient presque toujours dessinés dans des attitudes très naturelles, que la perspective s’observe même dans certains vols d’oiseaux, tandis que les figures humaines se montrent dans des postures contournées et bizarres. Les laques figurent en grand nombre, mais la plupart de ces petits meubles que le Japonais excelle à confectionner sont destinés à l’exportation européenne. On en trouve fort peu dans les habitations de Yédo. L’exposition nous offre aussi quelques grands objets en laque, des cabinets avec incrustations de porcelaines, des tables, des chaises à porteurs ou norimons. C’est le véhicule ordinaire des gens de qualité au Japon. Deux de ces norimons sont en laque avec des garnitures de cuivre doré ciselées avec autant de soin que les coins d’argent adaptés souvent aux petits meubles de luxe. Parmi les laques japonaises couronnées par le jury, c’est la laque brune semée de paillettes d’or, qui reste toujours la plus estimée et la mieux réussie.

Le public qui visite cette partie de l’exposition s’arrête volontiers devant quatre figures équestres bizarrement harnachées. Elles représentent des guerriers japonais dans leur costume de guerre.