Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 70.djvu/798

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

complète à l’observatoire d’Utrecht. il a trouvé 29 mètres et demi pour la vitesse de transmission des sensations dans le corps humain. Le même expérimentateur a démontré que la transmission à lieu dans la moelle épinière avec la même vitesse que dans les nerfs. Ce résultat est d’autant plus remarquable que les tubes nerveux subissent de grands changemens à leur entrée dans la moelle épinière, où, d’après M. Van Deen, ils cessent d’être sensibles à l’action de l’électricité, des substances chimiques, des blessures mécaniques, etc.

Il résulte de toutes ces expériences que le courant nerveux se propage avec une vitesse relativement peu considérable. La main qui lance une pierre fend l’air avec une vitesse de 22 mètres par seconde, qui est tout à fait comparable à celle du fluide nerveux ; le cheval de course, le lièvre et le lévrier vont tout aussi vite. L’onde artérielle, qui parcourt 9 mètres en une seconde, ne va que trois fois plus lentement.

Quand la sensation transmise à la moelle épinière donne lieu à une action réflexe, c’est-à-dire à un mouvement involontaire déterminé par l’intervention des cellules ganglionnaires, le mouvement réflexe se produit toujours plus tard que celui que provoque l’action directe du courant excitateur sur les muscles ; le retard varie d’un trentième à un dixième de seconde. On peut en conclure que l’action réflexe dans la moelle épinière prend douze fois plus de temps que la transmission d’une excitation à travers les nerfs sensitifs ou moteurs.

Le temps employé aux opérations du cerveau est aussi de quelques dixièmes de seconde. Le docteur de Jaager l’a mesuré de la manière suivante : la personne sur laquelle il expérimentait devait toucher la clé électrique de la main gauche lorsqu’elle recevait un choc électrique du côté droit, et de la main droite quand le choc venait du côté gauche. L’intervalle entre le choc et le signal fut trouvé de 20 centièmes de seconde quand cette personne savait d’avance de quel côté viendrait le choc, et de 27 centièmes lorsqu’elle n’était pas prévenue ; ainsi 7 centièmes de seconde étaient employés à la réflexion. M. Hirsch a trouvé qu’il s’écoule en moyenne 2 dixièmes de seconde avant qu’un observateur marque par un signal la perception d’une étincelle lumineuse ou d’un bruit instantané. Dans d’autres expériences, il était convenu que l’observateur toucherait la clé de la main gauche pour une étincelle blanche, et de la droite pour une lumière rouge ; alors il perdait de 3 à 4 dixièmes de seconde. La réflexion avait donc pris de 1 à 2 dixièmes de seconde. MM. Donders et de Jaager ont fait Inexpérience d’une manière un peu différente. L’un prononçait une syllabe quelconque ; l’autre la répétait aussitôt qu’il l’entendait ; un phonautographe enregistrait les vibrations de la parole. Quand la syllabe à répéter avait été concertée d’avance, le retard observé était de 2 dixièmes de seconde ; dans le cas contraire, il était de 3 dixièmes.

La pensée, on le voit, ne naît point instantanément : c’est un